A- Cela ne tient qu'à un fil
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Coumarine
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Kaléïdoplumes 4 :: Archives 2019/2023 :: Espace Ecriture et Photo :: Ecriture et Photo sur consigne :: Consignes 503
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A- Cela ne tient qu'à un fil
A partir de huit heures les ombres envahissent la maison. C’est l’heure où la nuit pourchasse les pâles lueurs qui s’accrochent encore au jour, étouffe les récalcitrantes sous son linceul obscur, et ricane de sa victoire en pointant vers la lune son étendard noir. C’est l’heure qui me terrifie.
Depuis des semaines c’est à ce moment qu’il me rejoint. J’entends son pas dans l’escalier, puis la clef ouvrir la porte, et sa voix trop douce, suave, qui me dit : « c’est l’heure Manon ». Il allume le spot qui m’aveugle, enfile les liens à mes poignets, à mes chevilles et à mon cou. Il se positionne derrière moi et à l’aide d’une grande croix en bois il « m’articule » selon sa volonté. Au début je résistais, alors il tirait sur la corde du cou, « douce Manon, lève le bras, tend la jambe. Bien Manon, c’est bien ainsi ». Au fil des jours il n’a plus à me commander, j’obéis à la tension du fil. Et quand il me dit « tu n’aurais pas dû partir Manon », sa voix devient plus dure et en même temps qu’il m’indique de lever un bras il tire nerveusement sur la corde du cou. Mais à chaque fois il relâche son étreinte. Il va bientôt venir.
Je ne m’appelle pas Manon, mais Catherine. Et ce cinglé est mon médecin. Célibataire, je venais de déménager pour me rapprocher de mon travail et par la même occasion, de ma meilleure amie Julie. C’est la seule personne que je connais dans ma nouvelle ville. Après avoir emménagé j’ai pris rendez-vous avec le docteur le plus proche de chez moi afin qu’il me donne mon vaccin contre la grippe. Quand je suis entrée dans son cabinet j’ai bien décelé sa surprise en me voyant, il a murmuré « Manon ? », et j’ai alors rectifié : « non, Catherine, Catherine Ringet, j’ai pris rendez-vous avec vous pour mon vaccin. » « Ah oui, asseyez-vous ». Il m’a fait une injection, et depuis je croupis ici. Il va bientôt venir.
Cela fait plusieurs jours qu’en m’obligeant à exécuter son macabre ballet il me dit : « on te cherche », et je sens plus de raideur dans ses gestes qui me guident. Mais je n’ose plus prononcer le moindre mot. Tout au début j’ai crié de révolte, alors il m’a fait une autre injection. Le lendemain j’étais accoutrée de cet étrange tutu noir, qui ne m’a plus quittée. Qui pourrait me chercher ? Seule Julie aurait pu donner l’alerte. Qu’est-ce qu’il attend ? Il va bientôt venir.
Etrange, d’habitude il est vraiment ponctuel. Cela fait plus d’une heure que je l’attends et j’angoisse. Pas que j’aie envie de le voir, mais que me réserve-t-il ? Et si un retard le contrarie comment son esprit malade va-t-il réagir ? Il va bientôt venir.
J’ai cru entendre une porte ! Je me recroqueville contre le mur et j’attends. Mes sens sont tendus à l’écoute du moindre bruit, mais plus rien. Juste un silence lourd et menaçant.
L’attente, lancinante et crispée. En rompant sa routine maniaque il déclenche en moi un sentiment de panique que j’ai de plus en plus de difficulté à maîtriser. Je frissonne, que signifie son absence ? Dans l’ignorance, dans ce doute gluant et visqueux qui enfle et qui commence à m’étouffer, j’en viens presque à espérer sa venue. Mais il va bientôt venir.
Il sait que je sais qui il est. Jamais il ne me laissera lui échapper. Est-il capable de me tuer ? La grande maîtrise de ce type dissimule une violence sourde qu’un rien risque d’enclencher. Une violence froide qui instrumente une mort propre, sans tache de sang, par injection par exemple! Surtout ne pas dormir.
Cela fait des heures qu’en position fœtale, les yeux hagards, je scrute cette porte dans le noir. Des larmes de peur inondent mon visage et je claque des dents. Quel salaud ! Ce cri intérieur provoque en moi un sursaut d’adrénaline qui me fait bondir vers la porte que je frappe de mes poings fermés et des pieds en hurlant : « Au secours ! A l’aide ! ». De désespoir j’agrippe la clinche pour la secouer et… la porte s’ouvre.
Depuis des semaines c’est à ce moment qu’il me rejoint. J’entends son pas dans l’escalier, puis la clef ouvrir la porte, et sa voix trop douce, suave, qui me dit : « c’est l’heure Manon ». Il allume le spot qui m’aveugle, enfile les liens à mes poignets, à mes chevilles et à mon cou. Il se positionne derrière moi et à l’aide d’une grande croix en bois il « m’articule » selon sa volonté. Au début je résistais, alors il tirait sur la corde du cou, « douce Manon, lève le bras, tend la jambe. Bien Manon, c’est bien ainsi ». Au fil des jours il n’a plus à me commander, j’obéis à la tension du fil. Et quand il me dit « tu n’aurais pas dû partir Manon », sa voix devient plus dure et en même temps qu’il m’indique de lever un bras il tire nerveusement sur la corde du cou. Mais à chaque fois il relâche son étreinte. Il va bientôt venir.
Je ne m’appelle pas Manon, mais Catherine. Et ce cinglé est mon médecin. Célibataire, je venais de déménager pour me rapprocher de mon travail et par la même occasion, de ma meilleure amie Julie. C’est la seule personne que je connais dans ma nouvelle ville. Après avoir emménagé j’ai pris rendez-vous avec le docteur le plus proche de chez moi afin qu’il me donne mon vaccin contre la grippe. Quand je suis entrée dans son cabinet j’ai bien décelé sa surprise en me voyant, il a murmuré « Manon ? », et j’ai alors rectifié : « non, Catherine, Catherine Ringet, j’ai pris rendez-vous avec vous pour mon vaccin. » « Ah oui, asseyez-vous ». Il m’a fait une injection, et depuis je croupis ici. Il va bientôt venir.
Cela fait plusieurs jours qu’en m’obligeant à exécuter son macabre ballet il me dit : « on te cherche », et je sens plus de raideur dans ses gestes qui me guident. Mais je n’ose plus prononcer le moindre mot. Tout au début j’ai crié de révolte, alors il m’a fait une autre injection. Le lendemain j’étais accoutrée de cet étrange tutu noir, qui ne m’a plus quittée. Qui pourrait me chercher ? Seule Julie aurait pu donner l’alerte. Qu’est-ce qu’il attend ? Il va bientôt venir.
Etrange, d’habitude il est vraiment ponctuel. Cela fait plus d’une heure que je l’attends et j’angoisse. Pas que j’aie envie de le voir, mais que me réserve-t-il ? Et si un retard le contrarie comment son esprit malade va-t-il réagir ? Il va bientôt venir.
J’ai cru entendre une porte ! Je me recroqueville contre le mur et j’attends. Mes sens sont tendus à l’écoute du moindre bruit, mais plus rien. Juste un silence lourd et menaçant.
L’attente, lancinante et crispée. En rompant sa routine maniaque il déclenche en moi un sentiment de panique que j’ai de plus en plus de difficulté à maîtriser. Je frissonne, que signifie son absence ? Dans l’ignorance, dans ce doute gluant et visqueux qui enfle et qui commence à m’étouffer, j’en viens presque à espérer sa venue. Mais il va bientôt venir.
Il sait que je sais qui il est. Jamais il ne me laissera lui échapper. Est-il capable de me tuer ? La grande maîtrise de ce type dissimule une violence sourde qu’un rien risque d’enclencher. Une violence froide qui instrumente une mort propre, sans tache de sang, par injection par exemple! Surtout ne pas dormir.
Cela fait des heures qu’en position fœtale, les yeux hagards, je scrute cette porte dans le noir. Des larmes de peur inondent mon visage et je claque des dents. Quel salaud ! Ce cri intérieur provoque en moi un sursaut d’adrénaline qui me fait bondir vers la porte que je frappe de mes poings fermés et des pieds en hurlant : « Au secours ! A l’aide ! ». De désespoir j’agrippe la clinche pour la secouer et… la porte s’ouvre.
Virgul- Humeur : Optimiste
Re: A- Cela ne tient qu'à un fil
Encore un texte bien sombre...J'ai beaucoup aimé.
Il se lit facilement et on est très vite dans l'ambiance effrayante que tu as voulu nous faire ressentir.
Dis moi, à la fin du recit, c'est bien Julie qui est derrière la porte!
Il se lit facilement et on est très vite dans l'ambiance effrayante que tu as voulu nous faire ressentir.
Dis moi, à la fin du recit, c'est bien Julie qui est derrière la porte!
Zephyrine- Humeur : Parfois bizarre
Re: A- Cela ne tient qu'à un fil
C'est incroyable ce texte, il est lourd de suspense!
Magnifiquement bien écrit!
"Il va bientôt venir" comme un refrain lancinant qui ponctue ton texte!
Qui est derrière la porte à la fin? tu ne le dis pas... peut-être le médecin criminel, mais peut-être pas!
BRAVO Virgule!
Magnifiquement bien écrit!
"Il va bientôt venir" comme un refrain lancinant qui ponctue ton texte!
Qui est derrière la porte à la fin? tu ne le dis pas... peut-être le médecin criminel, mais peut-être pas!
BRAVO Virgule!
Coumarine
Re: A- Cela ne tient qu'à un fil
Bravo pour ce texte qui nous tient en haleine !
_________________
Ne méprisez la sensibilité de personne. La sensibilité de chacun, c'est son génie.
(Charles Baudelaire)
FrançoiseB- Humeur : Positive
Re: A- Cela ne tient qu'à un fil
Cela fait plusieurs textes que je lis et qui parlent de séquestration.. .que vous ont inspiré les photos de Marine ...
ton texte est très enlevé , le rythme arrive exactement à nous faire vivre l angoisse de la pauvre Catherine
Une belle performance
ton texte est très enlevé , le rythme arrive exactement à nous faire vivre l angoisse de la pauvre Catherine
Une belle performance
EVA AlixXXL- Humeur : Égale
Re: A- Cela ne tient qu'à un fil
Non, mais vous êtes terribles !!! Voilà un deuxième texte (que j'adore aussi) mais sans fin. C'est pô juste
_________________
Martine27
Martine27- Humeur : Carpe diem ou Souris quand même
Re: A- Cela ne tient qu'à un fil
Virgul a écrit:C’est l’heure où la nuit pourchasse les pâles lueurs qui s’accrochent encore au jour, étouffe les récalcitrantes sous son linceul obscur, et ricane de sa victoire en pointant vers la lune son étendard noir. C’est l’heure qui me terrifie.
C'est beauuuuuuuuuuuuuuuu
Un texte sombre, et une fin ouverte (ah, que j'aime les fins ouvertes) qui nous mène vers tous les possibles.
Suspens très bien mené et lecture glaçante. Pauvre marine, vous lui en faites voir de toutes les couleurs
Cassy- Admin
- Humeur : Emotionnellement vivante
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