A - Lui, moi, l'autre

Pour moi qui ai le pouvoir de voyager dans le temps, et ce n'est pas toujours un cadeau autant le dire, je sais qu'un jour un zigoto habillé avec un drap que l'on appellera toge va sortir un truc du genre « la chute n'est pas un échec, l'échec c'est de rester là où on est tombé ». Ceci dit on en peut pas dire qu'il se soit relevé de son dernier échec, mais ceci est une autre histoire. Plus tard, ce sera repris dans le style « tomber 7 fois, se relever 8 », ou tout autre chiffre qui vous convient, c'est à vous de voir.

Bon bref ! J'en reviens à mon histoire. J'étais tranquille, j'étais peinarde, accoudée à une branche d'arbre me demandant si j'allais me laisser tenter par un petit en-cas. C'est alors que je l'ai vu se pointer. Ce mec me colle aux fesses depuis je ne sais combien de temps. Bon d'accord, il n'y a pas foultitude de filles dans le coin, mais il est pénible ce grand nigaud. Il faut reconnaître qu'il met drôlement bien en pratique les futurs conseils du grand palabreur ! J'ai beau lui dire de me lâcher les doigts de pieds, ouais les baskets ça n'a pas encore été inventé, pas moyen. Il se ramasse un râteau de ma part, il pleurniche un ou deux jours, et puis toc le revoilà qui pointe le bout de son nez.

Ce n'est pas qu'il est moche, enfin je suppose vu que je n'ai pas beaucoup de points de comparaison, mais il est vraiment collant. Je n'ai pas envie de le suivre derrière le premier fourré venu comme il semble l'espérer, même si je suis à peu près sûre qu'il n'a pas bien compris ce que l'on peut y faire derrière les fourrés !

Le grand patron, lui, me serine qu'il faut que je m'y fasse, que ce grand flandrin m'est destiné, qu'il faut qu'on croisse et qu'on se multiplie ! Eh ho, il a fini avec ça, je sais bien qu'il va faire le coup avec des petits pains et des poissons, enfin, si ce n'est lui c'est plutôt son fils, mais là aussi j'ai des doutes concernant la filiation. Bref, ce n'est pas la question ! Je ne me multiplie pas avec n'importe qui ! Surtout pas avec un type qui n'a aucune culture et aucune curiosité. Si on se met à la colle on va parler de quoi ? De fourrés et de petits pains ? Et puis quoi encore ? En gros, je n'ai qu'une envie c'est de me relever aussi une fois de plus et de me tirer les pattes de là !

Bon, ce matin, le patron a remis les couverts. C'est alors que j'ai peu à peu perdu patience et que je lui ai exprimé le fond de ma pensée, à savoir qu'il vaut mieux vivre seule que mal accompagnée, qu'en prime je m'enquiquine dans ce trou perdu et que j'ai besoin d'un minimum de stimulation intellectuelle et que ce n'est pas avec le mou du genou qu'il m'a collé aux basques que je vais m'éclater. D'accord, j'y ai été un peu fort, mais parfois il faut savoir mettre les points sur les I qui ne sont pas encore inventés.

Furibard, le patron, il m'a balancé un tas d'invectives, il m'a maudite et pas au sens littéral du terme, un vrai revanchard le barbu quand on lui dit non. M'en fiche, comme on le dira plus tard, ce qui ne vous tue pas vous rend plus fort et moi je suis prête à les relever les défis et à encaisser les échecs pour aller plus looiiin, aller plus haaauuut !!!

Du coup, il a étendu raide mon prétendant, il lui a coupé un morceau d'os et hop il lui a bricolé une jolie poupée pour croître et se multiplier. Ouf ! Je vais enfin pouvoir me tirer de ce paradis en carton pâte et m'intéresser d'un peu plus près au mignon qui se planque sous l'arbre interdit, pas mauvais d'ailleurs ces trucs rouges, pom, pom, pom, pooommm.

Allez, c'est pas tout, ciao, les nunuches. Ma chère Eve je te souhaite bien du plaisir avec ton Adam, foi de Lilith !