A. Rencontre du septième type

Logan avait mis dans le voyage toutes ses économies. Presque une année-lumière en hibernation. Un peu long, mais la galaxie de la lune bleue, il fallait la mériter. On ne faisait pas mieux dans cet univers-là. Là-bas, paraît-il qu'ils maîtrisaient les trous de ver (wormholes) pour s'infiltrer dans les failles du temps. C'est ainsi que bien avant le départ il avait connu Xardia, une grande brune aux cheveux descendant jusqu'aux plis du genou et des formes à l'aérodynamisme parfait.
Elle se matérialisait et s'allongeait près de lui à chaque pleine lune terrestre. Il aurait aimé la serrer dans ses bras, mais toute tentative fut vaine. Son corps n'était qu'apparence, brouillard duveteux et pourtant si net. Mystère des déchirures temporelles.

Xardia était encore jeune. À peine un petit siècle d'existence. Et puis qu'est-ce que cela voulait dire jeunesse ou vieillesse dans cet univers-là. Pas grand-chose. Comme les jeunes femmes de son âge elle rêvait des galaxies lointaines. Le système solaire semblait particulièrement intéressant, avec sa planète bleue, comme ici il y avait la lune bleue. Bien mieux qu'une coïncidence, c'était un signe. Les légendes anciennes disaient que des humanoïdes vivaient sur la cette planète bleue qui avait pour nom :  Terre. Ce nom sonnait comme un roulement de tambour planétaire. Elle profita d'une escapade avec ses amis pour explorer Le trou de ver de Morris-Thorne (*). C'est ainsi qu'elle découvrit  le système solaire et partit à la recherche de Logan. Enfin elle allait le voir « en vrai ».

Logan arriva dans la galaxie où résidait Xardia. Le vaisseau automatique mis fin à son hibernation. Il ne s'attendait pas à une telle immensité. On voyait à des distances infinies. Il n'y avait pas d'horizon mais une continuité sans fin. Logan chercha longtemps Xardia. Il était incapable de dire combien d'années passèrent. Et d'ailleurs il était dans un autre espace-temps qui n'avait rien à voir avec ce qu'il avait connu en système solaire. Il souffrait d'une immense solitude que personne ne connaîtra jamais. Pas une seule fois Xardia ne lui était apparue comme avant son départ. Peut-être avait-il eu tort de s'embarquer ?
Puis la chance finit toujours par arriver. Il reconnut aussitôt sa silhouette même si chaque fois qu'il tentait de l'approcher elle s'éloignait sans cesse. À force de persévérance il finit par l'atteindre. Il la prit dans ses bras et la couvrit de baisers. Cela dura une éternité complète. Une félicité intense.
Ce fut seulement alors que la possibilité de la regarder s'offrit à lui. Il comprit alors qu'il ne s'agissait que d'un clone.  Le clone expliqua que la véritable  Xardia le recherchait dans le système solaire. Logan se rappela les chevaliers d'antan offrant parfois leur vie pour rejoindre leur belle. Aussitôt il avala la fiole de poison. Puis il regarda la bouche du clone avant de lui voler un dernier baiser virtuel  comme s'il s'agissait de Xardia elle-même. Au moment de sombrer, il pensa : il faudra que je relise Roméo et Juliette.

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(*) Un trou de ver forme un raccourci à travers l'espace-temps Pour ceux que cela intéresse prière de lire les travaux sur le sujet du California Institute of Technology (consulter l'American journal of physics)
https://fr.wikipedia.org/wiki/American_Journal_of_Physics