A. Le mariage de plaisir

Amanda Mar 17 Nov 2020 - 15:50

Dans l'islam, il est permis à un homme qui part pour un long voyage de contracter un mariage à durée déterminée pour ne pas être tenté de fréquenter des prostituées.
On le nomme « Mariage de plaisir »
Même déjà marié et père de plusieurs enfants, c'est le privilège de l'homme de se choisir une deuxième épouse. La première épouse se doit d'accepter ce fait, même si cette situation est humiliante pour elle.

Pour approvisionner son commerce en épices rares, Amir se rendait tous les ans de Fez au Maroc au Sénégal, à Dakar. Un très long voyage, qui lui demandait des mois d'abstinence sexuelle car Amir était un honnête homme et fidèle à Lalla son épouse qui lui avait donné trois beaux enfants.

Et pourtant cette année-là, quand Amir rencontra Shadé, il perdit d'un seul coup la tête et ses sens s'éveillèrent tous en même temps. Il était littéralement envoûté par cette jeune beauté de 18 ans, au corps de rêve, qui se pliait à ses moindres désirs. Et davantage encore car Shadé, sensuelle et hardie lui fit découvrir des plaisirs insoupçonnés. Jamais Amir n'avait connu pareilles sensations avec sa première épouse.

C'est ainsi que le mariage se fit avec la bénédiction de l'iman mandaté à cette fin.

Amir, fou de joie, décida à l'encontre de ce qui se faisait d'habitude, de ramener Shadé avec lui au Maroc. Il ne pouvait plus se passer d'elle. Et tant pis pour la famille et tant pis pour les racontars.
L'euphorie fut de courte durée.

Est-il utile que je vous narre la réaction de Lalla, la première épouse quand elle comprit qu'elle devrait dorénavant partager son homme ?
Est-il nécessaire que je vous dise combien étaient choqués les enfants, tous bien en âge de comprendre que leur père agissait comme un jeune chien fou ?
Est-il compréhensible que le commerce d'Amir, si prospère, se dégrade vertigineusement, faute de clients, tous choqués par la présence de « l'épouse de plaisir » au sein de la famille ?

Shadé, quant à elle, se retrouva petit à petit à l'état d'esclave, dans un réduit misérable où Amir, amaigri et malade ne la rejoignait plus.
Elle s'enfuit par une nuit sans lune, non sans avoir vidé la caisse du magasin. Dans la chaleur et la poussière, elle prit le bus pour Tanger. De là, elle attendit le passeur qui l'amènerait à La Ceuta et ensuite en Espagne.

C'était sans compter sur un fait capital ! Shadé était noire ! Et donc doublement haïe par les Marocains de pure souche.
Apprenant sa fuite, Amir, au désespoir, se laissa mourir.

Pour Lalla et ses fils, pour les « amis » de la famille, et surtout pour la police marocaine, la traque avait commencé.

Librement inspiré par l'ouvrage du même nom de Tahar Ben Jelloun.

Myrte Mer 18 Nov 2020 - 8:50

Je n'ai jamais lu le Coran, je sais qu'il accepte la polygamie mais n'avais jamais entendu parler du "mariage du plaisir". Je me demandais au début de ton récit où était le rapport avec la consigne et tu as su maintenir le suspens jusqu'à la fin !

Zephyrine Mer 18 Nov 2020 - 14:29

Au début, j'ai cherché le rapport avec la consigne, mais j'ai vite compris qu'une vraie traque allait avoir lieu.
Merci de nous avoir expliqué ce qu'était ce genre de " mariage" bien cruel!

alainx Mer 18 Nov 2020 - 17:39

Myrte a écrit:Je n'ai jamais lu le Coran, je sais qu'il accepte la polygamie mais n'avais jamais entendu parler du "mariage du plaisir". Je me demandais au début de ton récit où était le rapport avec la consigne et tu as su maintenir le suspens jusqu'à la fin !

Sourate 4 verset 24: « À part cela, il vous est permis de les rechercher, en vous servant de vos biens et en concluant mariage, non en débauchés. Puis, de même que vous jouissez d’elles, donnez-leur leur mahr, comme une chose due. Il n’y a aucun péché contre vous à ce que vous concluez un accord quelconque entre vous après la fixation du mahr. Car Dieu est, certes, Omniscient et Sage. »

Ce verset est considéré comme autorisant « le mariage temporaire », « mariage de plaisir » ou encore «mut'a », en particulier par les sunnites et chiites. Cette interprétation ne fait donc pas l'unanimité.
En réalité le « mariage temporaire » est une manière de fréquenter d'autres femmes sans encourir les foudres du prophète ! Vu que lui-même pratiquait « le mariage de plaisir » !

Pour faire plus simple disons que : « avoir des maîtresses » n'est jamais répréhensible. Il faut juste que la/les maîtresses en question soient d'accord « verbalement »,. Et qu'on lui donne le mahr = de l'argent pour quelques mois.
— « N'est-ce pas que tu es d'accord ma poule » dit-il, prêt à balancer une torniole.…
Quant à la femme « légitime » on va quand même pas lui demander son avis ! Et puis quoi encore !

Les religions sont merveilleuses !

Daboum Mer 18 Nov 2020 - 22:13

Et en plus, les pauvres "épousées d'une nuit" sont considérées comme le déshonneur de leur famille et risquent gros s'ils l'apprennent.
Et si on inversait ? On pourrait traquer les "époux jetables" et les faire connaître. pipe

quelle que soit leur religion d'ailleurs !

silhène Sam 21 Nov 2020 - 18:17

Difficile de ne pas être révoltée face à cette pratique, évidemment colere

La traque sera terrible et sans pitié, hélas....

Sherkane Sam 21 Nov 2020 - 20:19

Un texte surprenant pour cette consigne. Par curiosité qu'est ce qui t'a fait écrire sur ce sujet?

Amanda Dim 22 Nov 2020 - 11:30

@Sherkane : j'ai mi une note en bas de mon texte. Je viens de lire le livre de Tahar Ben Jelloun, un écrivain marocain qui a le même titre et parle donc de ce mariage de plaisir sauf que l'intrigue est totalement différente de mon texte. Il n'y a pas de traque dans le livre, seulement des conflits familiaux er raciaux. Je te le conseille vivement, c'est la preuve que certains marocains sont plus racistes que les européens.

FrançoiseB Dim 22 Nov 2020 - 18:36

Un texte très intéressant, Amanda. Je ne connaissais pas le mariage du plaisir.
J'apprends beaucoup de choses en lisant vos textes ce soir ! Very Happy