A. Mon frère, ce héros

Ce matin-là, mon frère émergea difficilement du sommeil. Il s’était encore couché très tard, occupé à débarrasser mon ordinateur portable d’un virus et à réparer le sèche-cheveux de la voisine. En se dirigeant vers la cuisine, son pied heurta un des postes à galène qui jonchaient le plancher. Ses armoires en débordaient mais comment résister au modèle qu’il n’avait pas ? Son café était trop chaud, il ne put le boire et posa sa tasse fumante sur la table entre l’oscilloscope et le voltmètre pour se mettre à la recherche d’une paire de chaussettes. Il n’avait pas le temps de ranger son télescope, il le ferait à son retour. Avant de partir, il attrapa le sac poubelle posé vers l’entrée, content cette fois-ci de ne pas l’avoir oublié.
Dans le petit-matin frais, il faisait encore nuit, le cheveu en bataille, il frissonna en sentant  l’effleurer quelques flocons de neige fondue. La lune n’était plus visible dans le ciel sombre mais cette nuit il avait pu observer une magnifique géminide.
Il venait d’arriver à l’arrêt de bus où il avait coutume de m’attendre. Les usagés emmitouflés le regardaient d’un drôle d’air. Il se rappela qu’il avait oublié de boire son café. Lorsque j’arrivai dans mon auto, il se pencha pour ouvrir la portière, je lui dis :

- Tu es sur que tu n’as rien oublié ?

Mon frère avait encore à ses pieds ses pantoufles roses à motifs de fraises et son sac poubelle à la main. Mon frère ce géo-trouve-tout, la tête dans les étoiles et les pieds dans les fraises. Mon frère, mon héros.