A. Une table et un cahier

« Mesdames et messieurs, la bibliothèque va fermer ses portes dans dix minutes.
Veuillez déposer les livres que vous ne souhaitez pas emprunter et vous diriger vers les comptoirs d’emprunt pour finaliser les emprunts que vous souhaitez faire.
Toute l’équipe de la bibliothèque vous souhaite une bonne soirée et espère vous revoir très vite dans ses rayons. »
L’annonce diffusée par haut-parleur déclencha immédiatement un léger brouhaha dans la pièce. Des chaises raclèrent le sol, des couvertures de livre claquèrent un peu trop fort, des fermetures éclair de sac crissèrent sans scrupule, le silence feutré de la pièce se fit la malle avec un léger soupir de satisfaction. Pas facile de rester silencieux aussi longtemps !
Tout au fond de la pièce, derrière un vieux rayonnage poussiéreux, se trouve une ancestrale table d’écolier, un brin bancale.
Comme tous les soirs depuis près d’un mois une seule personne est installée à cette table.
Comme tous les soirs depuis près d’un mois cette personne est la seule à ne pas avoir bougé d’un millimètre lors de la diffusion de l’annonce. La tête penchée sur un vieux cahier d’écolier aux lignes d’un violet si pâle qu’il en est presque invisible, elle continue à écrire inlassablement.
Une écriture d’enfant sage, aux lettres bien formées, sans une tache, sans une rature.
Comme tous les soirs le bibliothécaire fait un dernier tour de vérification. Il ne faudrait pas enfermer quelqu’un dans la bibliothèque, ce serait une faute professionnelle.
Comme tous les soirs depuis près d’un mois il s’arrête devant la vieille table d’écolier et son unique occupante.
« On ferme… Vous pourrez revenir demain pour terminer votre liste... »
Sans un mot l’autre pose son stylo-plume, ferme son cahier d’écolier, se lève et quitte la bibliothèque sans un regard pour le bibliothécaire.
Comme tous les soirs depuis un mois ledit bibliothécaire devrait faire taire sa curiosité et partir sans ouvrir le cahier.
Mais ce soir, c’est son dernier soir. Demain il ne reviendra pas, demain sera le premier jour de sa vie de retraité. Et il ne peut se résoudre à quitter cette bibliothèque sans avoir percé le mystère du cahier d’écolier.
Alors après un regard furtif pour s’assurer qu’il est bel et bien seul il tire la chaise et s’assoit devant la vieille table d’écolier.
Une dernière hésitation, puis sa main se tend vers le cahier et l’ouvre délicatement.
Sous ses yeux une longue succession de pages blanches, vierges de toute écriture.
Fébrilement le bibliothécaire tourne les pages du cahier.
Il lui faut arriver aux dernières pages pour rencontrer une écriture d’enfant sage et lire la même phrase inlassablement écrite à l’encre bleue : « On peut aussi s’enfuir par là ».

C'est un texte plein de mystère jusqu'à la phrase finale. J'ai souri car dans la bibliothèque où je me rends régulièrement il y a un homme assis au fond à une table qui lit et écrit. Je serais très curieuse de savoir ce qu'il fait mais n'ose pas lui demander. Un jour peut-être...

Je me suis laissée emporter par ton texte, en ayant hâte de découvrir la fin
J'ai vraiment apprécié !

Nous ne connaîtrons pas le secret de cet homme... Cette histoire mériterait une suite

Bravo Madeleine, un joli récit.

Mystère, mystère...

J’ai lu attentivement ton texte, très bien écrit. Moi aussi j’attends la suite, où j’en saurai un peu plus sur ce mystérieux personnage.
Mais tout ne s’explique pas!

Tu nous tiens en haleine mais non on n'en saura pas plus sur cet homme mystérieux . Bravo

Un texte de Mad de qualité supérieure
Tout à fait le genre que j'adore ! Chacun y trouvera sa nourriture.
Dès la première ligne on est soi-même dans la bibliothèque. Cela m'a évoqué des souvenirs de jeunesse.
Et puis, peut-être faut-il apprendre à s'enfuir… d'ailleurs c'est ce que va faire le bibliothécaire. S'enfuir pour une autre vie.
Et surtout, ne pas lever le mystère de l'homme en question… ce serait un peu tuer la poule aux œufs d'or…

Un texte bien mystérieux qui touche au fantastique. J'ai beaucoup aimé!

J'ai relu ton texte, Madeleine, car dans la plupart des commentaires les participants y voit un homme, or moi j'avais tendance à y voir une femme et même une fillette comme sur la photo de la consigne mais non, tu ne le précises pas volontairement pour plus de mystère.

On est tout de suite pris par l'ambiance de cette bibliothèque.
On a hâte de découvrir le retardataire.
On a un peu pitié du bibliothécaire qui part à la retraite et qui ne peut s'empêcher de lire.
Ce message sibyllin lui serait-il destiné ?
On reste sur sa faim, on en redemande des textes comme le tien, du grand art Madeleine.
Tu nous auras tous et toutes épatés cette fois encore !

Un texte bien mystérieux qui aiguise la curiosité
Qui, pourquoi, comment ?
Bref on reste sur la fin …

Merci de ton passage Admin!