A. Nos illusions perdues
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Amanda
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A. Nos illusions perdues
Chaque fois que nous passions devant la petite maison près de la rivière, nous ressentions tous l’envie d’être un des enfants de la famille qui l’habitait. Le père, garde-forestier, la mère au foyer toujours souriante, souvent attelée à ses fourneaux à préparer des plats qui sentaient bons et leurs trois enfants écoliers sans histoires représentaient pour nous la famille idéale où nous aurions aimé vivre.
Patrice avait un père alcoolique qui le battait, Franck n’avait pas de père, sa mère dépressive se comportait la plupart du temps comme une enfant démunie et moi, ayant perdu mes parents très jeunes, j’avais été élevé par mes grand-parents âgés, fatigués et dépassés par les évènements. Cela fit de nous trois copains inséparables qui partagions nos jeux et nos soucis. Nous ne fréquentions pas les enfants de la famille idéale car , en dehors de l’école où ils étaient plutôt bons élèves, ils participaient à de nombreuses activités sportives ou bien partaient avec leurs parents pour des destinations mystérieuses pour nous mais que nous imaginions merveilleuses.
- Si jamais je deviens orphelin, j’aimerais être adopté par cette famille! avait dit Franck
Ce jour-là, nous venions de passer la maison de la famille idéale, Franck l’appelait « La petite maison dans la prairie », nous avions traversé le pont après la courbe du champ de noisetiers, lorsque nous vîmes le père garde-forestier, dans l’eau jusqu’à la moitié du corps à tirer à lui à l’aide d’une corde un gros sac noir qui semblait très lourd. Il peinait car, malgré la pente des berges, les rejets de saules faisaient obstacle. Nous restâmes immobiles et silencieux, à observer ce qui se passait. Il tirait comme un forcené et le courant de la rivière ne facilitait pas son équilibre. Finalement, le sac finit par atteindre le bord de l’eau et nous entendîmes un grand plouf. Aussitôt, l’homme défit le noeud de la corde et le sac fut emporté par le courant. Nos yeux suivirent sa course un moment puis il disparut.
Le garde-forestier roula la corde autour de son bras et sortit de la rivière en jetant des regards alentour. Nous retînmes notre souffle jusqu’à ce qu’il s’enfonce dans la forêt.
- C’était un corps ! lança Patrice
- Tu crois que c’est lui qui l’a tué ? ajouta Franck
- Ne vous emballez pas, ajoutai-je, essayons de suivre le cours de l’eau pour retrouver ce sac.
Nous ne le retrouvâmes pas et, même si le lendemain, après l’école, nous partîmes scruter les moindres méandres de la rivière jusqu’au coucher du soleil, nous rentrâmes bredouille.
Dans nos têtes s’échafaudaient les pires scénarios. Le père paisible était-il un assassin ? Sous l’image idyllique que représentait la famille de « la petite maison dans la prairie » se cachait-il des drames ?
Et puis la nouvelle ne mit pas longtemps à devenir le fait le plus marquant de notre vie d’enfants : la maman qui préparait de bons petits plats avait disparue !
Les trois enfants de la famille ne vinrent plus à l’école. Une enquête de police fut mise en place.
Le père avait dit aux policiers que son épouse était partie un matin en train pour rendre visite à sa mère malade, or elle n’y était jamais arrivée, et on ne l’avait plus revue.
Les jours passèrent et les gros titres affichés au kiosque à journaux de la place du village annonçaient chaque jour l’évolution de l’enquête. Lorsque nous apprîmes que la rivière allait être fouillées, notre sang ne fit qu’un tour, nous nous sentîmes mal, un peu comme si nous étions coupables.
- Coupables non, dis-je à mes amis, mais complices de ne pas avoir dit ce que nous avons vu aux policiers oui.
Deux jours après, le sac fut retrouvé coincé entre des rochers et nous ne fumes pas surpris d’apprendre que le corps de la malheureuse mère de famille était à l’intérieur.
Nous n’avons su ce qu’il s’était passé que longtemps après. Il s’avéra que le père de famille était un tueur en série et qu’il n’en était pas à son premier coup d’essai.
Notre vie d’enfants bascula à cette époque, nous venions de perdre nos illusions. Les trois garçons sommes restés amis longtemps, jusqu’à ce que les aléas de nos parcours nous éloignent les uns des autres et toujours, nous avons gardé notre secret. Je n’en ai jamais parlé ni à mon épouse ni à mes enfants. Cela n’aurait pas changé grand chose sans doute. Ce qui avait changé c’était notre innocence et notre crédulité : ne jamais se fier aux apparences.
Juste après le verdict de la condamnation du garde-forestier, j’avais dit à Franck : tu imagines si tu avais été adopté par cette famille ! Tu l’as échappé belle !
Patrice avait un père alcoolique qui le battait, Franck n’avait pas de père, sa mère dépressive se comportait la plupart du temps comme une enfant démunie et moi, ayant perdu mes parents très jeunes, j’avais été élevé par mes grand-parents âgés, fatigués et dépassés par les évènements. Cela fit de nous trois copains inséparables qui partagions nos jeux et nos soucis. Nous ne fréquentions pas les enfants de la famille idéale car , en dehors de l’école où ils étaient plutôt bons élèves, ils participaient à de nombreuses activités sportives ou bien partaient avec leurs parents pour des destinations mystérieuses pour nous mais que nous imaginions merveilleuses.
- Si jamais je deviens orphelin, j’aimerais être adopté par cette famille! avait dit Franck
Ce jour-là, nous venions de passer la maison de la famille idéale, Franck l’appelait « La petite maison dans la prairie », nous avions traversé le pont après la courbe du champ de noisetiers, lorsque nous vîmes le père garde-forestier, dans l’eau jusqu’à la moitié du corps à tirer à lui à l’aide d’une corde un gros sac noir qui semblait très lourd. Il peinait car, malgré la pente des berges, les rejets de saules faisaient obstacle. Nous restâmes immobiles et silencieux, à observer ce qui se passait. Il tirait comme un forcené et le courant de la rivière ne facilitait pas son équilibre. Finalement, le sac finit par atteindre le bord de l’eau et nous entendîmes un grand plouf. Aussitôt, l’homme défit le noeud de la corde et le sac fut emporté par le courant. Nos yeux suivirent sa course un moment puis il disparut.
Le garde-forestier roula la corde autour de son bras et sortit de la rivière en jetant des regards alentour. Nous retînmes notre souffle jusqu’à ce qu’il s’enfonce dans la forêt.
- C’était un corps ! lança Patrice
- Tu crois que c’est lui qui l’a tué ? ajouta Franck
- Ne vous emballez pas, ajoutai-je, essayons de suivre le cours de l’eau pour retrouver ce sac.
Nous ne le retrouvâmes pas et, même si le lendemain, après l’école, nous partîmes scruter les moindres méandres de la rivière jusqu’au coucher du soleil, nous rentrâmes bredouille.
Dans nos têtes s’échafaudaient les pires scénarios. Le père paisible était-il un assassin ? Sous l’image idyllique que représentait la famille de « la petite maison dans la prairie » se cachait-il des drames ?
Et puis la nouvelle ne mit pas longtemps à devenir le fait le plus marquant de notre vie d’enfants : la maman qui préparait de bons petits plats avait disparue !
Les trois enfants de la famille ne vinrent plus à l’école. Une enquête de police fut mise en place.
Le père avait dit aux policiers que son épouse était partie un matin en train pour rendre visite à sa mère malade, or elle n’y était jamais arrivée, et on ne l’avait plus revue.
Les jours passèrent et les gros titres affichés au kiosque à journaux de la place du village annonçaient chaque jour l’évolution de l’enquête. Lorsque nous apprîmes que la rivière allait être fouillées, notre sang ne fit qu’un tour, nous nous sentîmes mal, un peu comme si nous étions coupables.
- Coupables non, dis-je à mes amis, mais complices de ne pas avoir dit ce que nous avons vu aux policiers oui.
Deux jours après, le sac fut retrouvé coincé entre des rochers et nous ne fumes pas surpris d’apprendre que le corps de la malheureuse mère de famille était à l’intérieur.
Nous n’avons su ce qu’il s’était passé que longtemps après. Il s’avéra que le père de famille était un tueur en série et qu’il n’en était pas à son premier coup d’essai.
Notre vie d’enfants bascula à cette époque, nous venions de perdre nos illusions. Les trois garçons sommes restés amis longtemps, jusqu’à ce que les aléas de nos parcours nous éloignent les uns des autres et toujours, nous avons gardé notre secret. Je n’en ai jamais parlé ni à mon épouse ni à mes enfants. Cela n’aurait pas changé grand chose sans doute. Ce qui avait changé c’était notre innocence et notre crédulité : ne jamais se fier aux apparences.
Juste après le verdict de la condamnation du garde-forestier, j’avais dit à Franck : tu imagines si tu avais été adopté par cette famille ! Tu l’as échappé belle !
Myrte- Humeur : Curieuse
Re: A. Nos illusions perdues
Des frissons! Tu m’as donné des frissons.
Un vrai roman noir que je vois bien adapté au cinéma.
Bravo pour ton imagination et même si on comprend la fin un peu trop tôt, j’ai beaucoup aimé !
Un vrai roman noir que je vois bien adapté au cinéma.
Bravo pour ton imagination et même si on comprend la fin un peu trop tôt, j’ai beaucoup aimé !
Zephyrine- Humeur : Parfois bizarre
Re: A. Nos illusions perdues
Excellent récit qui commence en douceur et finit dans l'horreur ! Tu es une virtuose Myrte pour ainsi nous tenir en haleine et nous amener petit à petit à un final bien ficelé !
Amanda- Humeur : positivement drôle
RE A : Nos illusions perdues
Beaucoup d'enfants pensent que c'est mieux chez les autres et ce récit démontre qu'il ne faut pas se fier aux apparences .
Jai aimé ton texte .
Jai aimé ton texte .
automne- Humeur : égale
Re: A. Nos illusions perdues
Un récit qui pour moi a su maintenir le suspense.
Longtemps j'espérais que le sac contenait tout autre chose et qu'une pirouette finale nous rassurerait…
c'est justement ce qui fait la force dont tu as mené l'affaire. Le terrible allait arriver !
Alors :
Longtemps j'espérais que le sac contenait tout autre chose et qu'une pirouette finale nous rassurerait…
c'est justement ce qui fait la force dont tu as mené l'affaire. Le terrible allait arriver !
Alors :
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"Écrire, c'est brûler vif, mais aussi renaître de ses cendres. "
Blaise Cendrars
ICI : Le Blog d'AlainX
alainx- Humeur : ça va ! et vous ?
Re: A. Nos illusions perdues
Super et bien flippant. A mon sens, ce n'était pas la peine d'en faire un tueur en série.
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Martine27
Martine27- Humeur : Carpe diem ou Souris quand même
Re: A. Nos illusions perdues
Brrr... Il ne faut pas se fier aux apparences, la preuve...
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Ne méprisez la sensibilité de personne. La sensibilité de chacun, c'est son génie.
(Charles Baudelaire)
FrançoiseB- Humeur : Positive
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