A.Précieux bagage.

Il y a des voyages qui se font avec un seul bagage, le coeur.

C'est Audrey Hepburn, l'actrice préférée de ma grand-mère qui un jour a prononcé ces mots.
J'ai retenu cette formule car elle colle parfaitement à ce que je fais dans la vie.
Allongé sur le lit de ma petite chambre sous les toits, je rêve en regardant par la fenêtre au dessus de moi les étoiles qui s'allument les unes après les autres.
Je songe à mes voyages, à ceux que je fais régulièrement avec pour tout bagage, un coeur!
Alors, avez-vous deviné mon métier?

Mon boulot consiste à transporter les coeurs miraculeusement prélevés sur de malheureuses victimes d'accidents de la route, par exemple, vers une personne cardiaque qui attend fébrilement, depuis de longs mois la greffe d'un coeur en bon état.
Ça se passe toujours de la même façon : mon téléphone sonne et je sais que je vais entrer en piste.
Je file à l'hopital où une voiture médicalisée m'attend. Le temps de me mettre au volant, on a déjà déposé à l'arrière un sac réfrigéré qui contient le précieux organe, maintenu à 4 degrés, sous la surveillance de deux personnes qui veillent à ce que les battements du coeur ne soient jamais interrompus.
Souvent je n'ai pas plus de 2 heures 30 pour effectuer le trajet jusqu'à l'hopital où l’organe sera greffé. Tout cela bien-sûr si le trajet en avion n'est pas possible.
La voiture est parfois escortée par les motards de la police, l'ambiance est tendue et je me concentre sur la route.

Je ne peux pourtant pas m'empêcher de penser à l'organe vivant que je transporte. D'où vient ce coeur? A qui appartenait-il? Un jeune-homme m'a t-on dit...
Pour qui, pour quoi a t-il battu parfois plus fort? A t-il eu des peines ce coeur, a t-il été brisé par un chagrin d'amour?
Tenez, j'aimerais que la personne à qui il appartenait nous voit de la haut et je voudrais lui dire :  "Rassurez-vous, on prend bien soin de tout et puis vraiment, merci !"

Je pense aussi à la personne qui attend avec anxiété ce cadeau, une jeune femme paraît-il.
Qui est elle? A t-elle un peu peur maintenant que le grand moment est arrivé? Repense t-elle à ces longs mois d'attente, se disant qu'enfin c'est le grand jour, le coeur d'un autre va battre dans sa poitrine.
A la fin du voyage, je suis toujours un peu ému. Evidemment, personne n'a le temps de me saluer, de me dire que j'ai fait vite et bien! Je n'ai plus qu' à rentrer chez moi, le devoir accompli!

Je retrouve ma chambre sous les toits. La lumière restera longtemps allumée cette nuit et comme d'habitude je sourirai tout en me disant que j'aime ce métier, il me donne l'impression d'être utile et puis, rendez-vous compte :  j'entreprends des voyages avec un coeur pour tout bagage!

Ton texte est en osmose parfaite avec la photo.
Son sujet est une trouvaille mais qui colle à la réalité.
C'est vrai aussi qu'il y a une problématique dans les greffes entre celui à qui on a prélevé et celui qui reçoit. Je ne sais plus quel écrivain a écrit un livre sur le sujet, dans lequel le donneur se fait un avec le greffé au point de se fondre dans sa personnalité. Quelqu'un connaît ?
J'aime aussi la chute ainsi que la modestie du "transporteur". C'est un vrai métier donc, transporteur de coeur ?

Un angle inattendu pour traiter cette consigne.
C'est donc intéressant !
Transporteur de cœur. Au sens propre dans ce texte.

Une profession qui permet de transmettre une seconde vie au receveur , quelle responsabilité de transporter ce précieux organe dans un temps limité .

Zéphyrine tu as vraiment pris la phrase imposée au pied de la lettre, si je puis dire, en nous racontant ce métier qui mérite d'être salué !
Il fallait y penser !

Que voilà un texte original !!! Décidément cette phrase en a inspiré plus d’un