A- Pas pour rien!

Les temps sont durs pour les rêveurs, ceux qui ont battu le pavé en 68, ceux qui criaient « Ici et maintenant », ceux qui ont fait trembler les murs du vieux monde, ceux qui ont cru à une nouvelle société où étudiants, paysans, ouvriers, main dans la main, demandaient l’impossible, ne plus perdre leur vie à la gagner.
Putain, tout ça pour presque rien !

Les temps sont durs pour les rêveuses, celles qui ont connu les robes courtes et les cheveux au vent, celles dont les filles ont revêtu la burka et vécu sous l’oppression des fous de Dieu, celles dont les petites filles ont retrouvé la liberté, de sortir, d’étudier, d’aimer pour retomber entre les griffes des talibans, leurs rêves à nouveau brisés dans un pays où être femme c’est être moins que rien.
Putain, tout ça pour rien !

On s’habitue à tout, au mauvais temps qui dure, au travail harassant, aux coups durs de la vie. On s’habitue à tout, à un départ précipité, à l’amour qui s’éteint, aux mots blessants, aux maux persistants. On s’habitue à tout, au beau temps qui revient, à la terre infertile, aux pleurs d’un condamné. On s’habitue à tout, aux bombes qui tombent sur les civils, au peuple qu’on massacre, aux dictateurs braillards, à monsieur « je sais tout ».
Mais accepter l’inacceptable ça finit par nous tuer.
Putain, c’est pas rien !

Je voudrais aller très loin dans un endroit plein d’autre chose que cette boue qui m’empêche d’avancer, que ces images à la télé, que ces horreurs sans cesse étalées, que la haine et la violence mêlées. Là où on peut se ressourcer, retrouver l’envie de contester, de protester et y trouver la force de revenir la tête haute et le pouvoir de tout changer.  

Ne les laissons pas croire que plus rien ne nous atteint, que seul compte notre propre destin, continuons à rêver, rappelons nous de regarder les étoiles et non pas nos pieds.

Putain, que ce soit pas pour rien !