A Préjugé favorable TEXTE DE CATSONIOU
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A Préjugé favorable TEXTE DE CATSONIOU
Préjugé favorable
L’histoire de leur vie commence le jour de l’arrivée de mon père. Tel est l’enseignement qu’on peut
tirer de cette photo prise, il y a 90 ans.
Clément parcourait les vallées, son baluchon sur le dos, portant à bout de bras, une caisse en bois
dans laquelle, il avait quelques outils personnels, lui permettant à l’occasion de changer quelques
ardoises ou tuiles sur une toiture.
Mais il préférait le travail de la forge dans lequel il excellait. En ce temps-là, il n’était pas un bourg
qui n’eut son maréchal-ferrant. Généralement, il suffisait à dépêcher le travail que lui confiaient les
paysans de la vallée : ferrer bœufs et chevaux, refaire une houe, le soc d’une charrue, voire une
panoplie de loquets, et autres systèmes de fermeture, et encore toutes sortes d’outils dont il est
besoin pour faire valoir une ferme.
Il arrivait qu’un surcroît de travail l’amène à embaucher pour quelques jours un de ces compagnons
de passage, généralement habiles, le dessus du panier au regard du journalier ou manouvrier à qui
on ne pouvait confier que de simples tâches.
Auguste, mon grand-père, maréchal-ferrant de son état était partagé entre orgueil et crainte de
l’avenir pour sa forge.
Octave, son fils, en pension à l’école des frères Wright, est en passe de devenir un mécanicien
d’aviation et pourquoi pas ? Un jour, il sera peut-être pilote d’essai …
Orgueil du père, certes, mais crainte de Marie, épouse d’Auguste et encore plus de Joséphine, sa
mère qui, dans cette maison a encore une certaine influence sur son fils, le forgeron, maître des
lieux. Mais, pour l’occasion, Auguste s’est montré inflexible : Octave, quasiment capable d’en
remontrer à son père en matière de travail du fer, est premier de sa classe en traçage, ce qui dans
l’industrie aéronautique, est susceptible de lui ouvrir bien des portes.
Hélas, il disparaîtra en 1932, victime d’un accident alors qu’il était pilote dans une des deux
escadrilles du 36ème groupe d’aviation.
Quant à Mariette, sœur aînée d’Octave, elle n’a pas encore trouvé chaussure à son pied. Ses parents
s’inquiètent : va-t-elle coiffer Sainte-Catherine ? Parti enviable s’il en est - le commerce du père
n’est-il pas un des plus prospère de la vallée ? Elle n’a encore trouvé aucun garçon à sa
convenance…
Examinant cette photo, toujours bien en place sur le mur surplombant la cheminée, j’imagine que
Marcel, photographe d’occasion et de passage en cette soirée 1929, n’a pas été sans remarquer le
regard intéressé de Mariette, sa nièce.
« Il n’est pas si mal, ce Clément » semble t-elle se dire … L’Auguste, lui, en artisan avisé, a un
préjugé favorable pour ce jeune ouvrier qui, avant le souper, a pu faire étalage de son savoir en
matière de forge. Madré, l’Auguste a posé quelques questions pièges. Des réponses, il en conclut
que le garçon sait de quoi il parle. Accessoirement, il pourra aussi monter sur les toits. En quelque
sorte, ce Clément-là, c’est un homme toutes mains ! Mais va-t-il se fixer ou partir vers quelque
nouvelle aventure ?
Non, sans forfanterie, je peux dire aujourd’hui : Clément, mon père était un homme providentiel.
Aux côtés d’Auguste, jusqu’à la fin de la guerre de 40, il donnera satisfaction à sa clientèle ; plus
tard, il s’adaptera à l’évolution de l’agriculture en commercialisant du matériel agricole, jusqu’aux
tracteurs et outils de plus en plus performants.
Mariette a été conquise par la gentillesse de ce garçon. Devenue sa femme, elle a évolué tout
comme la forge du père. Un jour, elle a appris à donner l’essence, puis à faire les factures, relancer
les éventuels clients oublieux de régler leur dû …
Cependant, le commerce n’a pas occupé Auguste et Mariette au point d’oublier leurs devoirs. Ils
ont pris le temps de faire deux enfants, Monique, ma sœur cadette, aujourd’hui, retraitée de
l’enseignement et moi, l’Antoine qui va sur ses 87 ans dont une bonne quarantaine passée à vendre
tracteurs, botteleuses, moissonneuses – batteuses, ceci en demeurant toujours dans la maison où
Clément débarqua un jour d’hiver à la fin des années vingt … de l’autre siècle.
L’histoire de leur vie commence le jour de l’arrivée de mon père. Tel est l’enseignement qu’on peut
tirer de cette photo prise, il y a 90 ans.
Clément parcourait les vallées, son baluchon sur le dos, portant à bout de bras, une caisse en bois
dans laquelle, il avait quelques outils personnels, lui permettant à l’occasion de changer quelques
ardoises ou tuiles sur une toiture.
Mais il préférait le travail de la forge dans lequel il excellait. En ce temps-là, il n’était pas un bourg
qui n’eut son maréchal-ferrant. Généralement, il suffisait à dépêcher le travail que lui confiaient les
paysans de la vallée : ferrer bœufs et chevaux, refaire une houe, le soc d’une charrue, voire une
panoplie de loquets, et autres systèmes de fermeture, et encore toutes sortes d’outils dont il est
besoin pour faire valoir une ferme.
Il arrivait qu’un surcroît de travail l’amène à embaucher pour quelques jours un de ces compagnons
de passage, généralement habiles, le dessus du panier au regard du journalier ou manouvrier à qui
on ne pouvait confier que de simples tâches.
Auguste, mon grand-père, maréchal-ferrant de son état était partagé entre orgueil et crainte de
l’avenir pour sa forge.
Octave, son fils, en pension à l’école des frères Wright, est en passe de devenir un mécanicien
d’aviation et pourquoi pas ? Un jour, il sera peut-être pilote d’essai …
Orgueil du père, certes, mais crainte de Marie, épouse d’Auguste et encore plus de Joséphine, sa
mère qui, dans cette maison a encore une certaine influence sur son fils, le forgeron, maître des
lieux. Mais, pour l’occasion, Auguste s’est montré inflexible : Octave, quasiment capable d’en
remontrer à son père en matière de travail du fer, est premier de sa classe en traçage, ce qui dans
l’industrie aéronautique, est susceptible de lui ouvrir bien des portes.
Hélas, il disparaîtra en 1932, victime d’un accident alors qu’il était pilote dans une des deux
escadrilles du 36ème groupe d’aviation.
Quant à Mariette, sœur aînée d’Octave, elle n’a pas encore trouvé chaussure à son pied. Ses parents
s’inquiètent : va-t-elle coiffer Sainte-Catherine ? Parti enviable s’il en est - le commerce du père
n’est-il pas un des plus prospère de la vallée ? Elle n’a encore trouvé aucun garçon à sa
convenance…
Examinant cette photo, toujours bien en place sur le mur surplombant la cheminée, j’imagine que
Marcel, photographe d’occasion et de passage en cette soirée 1929, n’a pas été sans remarquer le
regard intéressé de Mariette, sa nièce.
« Il n’est pas si mal, ce Clément » semble t-elle se dire … L’Auguste, lui, en artisan avisé, a un
préjugé favorable pour ce jeune ouvrier qui, avant le souper, a pu faire étalage de son savoir en
matière de forge. Madré, l’Auguste a posé quelques questions pièges. Des réponses, il en conclut
que le garçon sait de quoi il parle. Accessoirement, il pourra aussi monter sur les toits. En quelque
sorte, ce Clément-là, c’est un homme toutes mains ! Mais va-t-il se fixer ou partir vers quelque
nouvelle aventure ?
Non, sans forfanterie, je peux dire aujourd’hui : Clément, mon père était un homme providentiel.
Aux côtés d’Auguste, jusqu’à la fin de la guerre de 40, il donnera satisfaction à sa clientèle ; plus
tard, il s’adaptera à l’évolution de l’agriculture en commercialisant du matériel agricole, jusqu’aux
tracteurs et outils de plus en plus performants.
Mariette a été conquise par la gentillesse de ce garçon. Devenue sa femme, elle a évolué tout
comme la forge du père. Un jour, elle a appris à donner l’essence, puis à faire les factures, relancer
les éventuels clients oublieux de régler leur dû …
Cependant, le commerce n’a pas occupé Auguste et Mariette au point d’oublier leurs devoirs. Ils
ont pris le temps de faire deux enfants, Monique, ma sœur cadette, aujourd’hui, retraitée de
l’enseignement et moi, l’Antoine qui va sur ses 87 ans dont une bonne quarantaine passée à vendre
tracteurs, botteleuses, moissonneuses – batteuses, ceci en demeurant toujours dans la maison où
Clément débarqua un jour d’hiver à la fin des années vingt … de l’autre siècle.
Zephyrine- Humeur : Parfois bizarre
Re: A Préjugé favorable TEXTE DE CATSONIOU
J'aime beaucoup cette généalogie forgée entre coup de coeur et sens pratique !
_________________
Martine27
Martine27- Humeur : Carpe diem ou Souris quand même
Re: A Préjugé favorable TEXTE DE CATSONIOU
J'ai pu poster ton texte Castoniou, mais la mise en page n'est pas top....Je suis désolée!
J'ai aimé cette belle histoire très bien "ficelée " où les personnages bien décrits, rendent le récit attrayant!
J'ai aimé cette belle histoire très bien "ficelée " où les personnages bien décrits, rendent le récit attrayant!
Zephyrine- Humeur : Parfois bizarre
Re: A Préjugé favorable TEXTE DE CATSONIOU
Toute une génération qui évolue, une famille qui se construit, on dirait une histoire vraie ...C'est le cas ?
Amanda- Humeur : positivement drôle
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