BBV & Numérique associés

Je vous écris de la campagne  et j’aimerais vous faire partager ce qui aujourd’hui prend l’essentiel de mon temps : la vie associative.

En 1976, la MSA (Mutualité Sociale Agricole) contribuait à rassembler les Clubs dits du 3ème âge dans une Fédération nationale  - les aînés ruraux – qui comptait alors  plus d’un million d’adhérents.
Que proposer à ces nouveaux retraités ?  Certains, grâce à l’octroi de « l’indemnité viagère de départ », pour la première fois de leur vie, libérés du travail de la ferme, disposaient de quelques moyens financiers  pour satisfaire leurs envies.

BBV , ces trois initiales  résument l’essentiel des activités qui suffisaient à leur bonheur :  Belote, Bouffe, Voyages. En effet, les ruraux de cette fin du 20ème siècle avaient plaisir à se retrouver chaque semaine ou quinzaine  pour taper le carton, partager  un bon repas, et partir visiter des contrées, des pays  dont ils n’auraient jamais imaginer fouler le sol …

Cependant, mener à bien ces activités nécessitait d’en structurer l’organisation. Certes, la loi 1901  a balisé le terrain, mais encore faut-il que des personnes se coiffent de la casquette de dirigeants d’associations. Celles et ceux qui, dans leur vie active étaient soit des élus locaux, responsables de syndicats agricoles ou élus dans des organismes sociaux, notamment MSA, voire Crédit Agricole avaient le profil pour devenir    Présidents, Secrétaires, Trésoriers de Clubs, parfois aux côtés d’enseignants, syndicalistes … Les adhérents, imprégnés de la notion « on ne change pas une équipe qui gagne » se contentant du rôle de supporters, renouvelaient d’année en année le mandat de leurs dirigeants, à la satisfaction des uns et des autres.  Peut-être aurait-il fallu se soucier davantage du besoin de renouvellement tant par le recrutement de nouveaux adhérents que par le renouvellement des cadres associatifs , essentiellement présidents ?

Tout allait pour le meilleur des mondes. La routine, c’était la Belote hebdomadaire ou bimensuelle, ponctuée de ci de là de repas plus ou moins plantureux qui faisaient date. Et puis, il y  avait les Voyages de cinq  à huit jours et les sorties sur une journée. Généralement, on gardait en guise de souvenirs les meilleurs restaurants. Dame, la  bonne Bouffe, n’est-ce pas un élément essentiel de la vie ?

Affiliés si l’on peut dire à la même crèmerie, partageait-on des moments de convivialité d’un village à l’autre, d’une commune à l’autre, et à fortiori d’un coin à l’autre du département  - plus de 100 km - ? Oui, très ponctuellement, par exemple pour les concours de belote  ou la randonnée accompagnée d’un repas forcément. Et encore, l’Assemblée Générale départementale annuelle, suivie essentiellement par les premiers responsables de Clubs.   Toutefois, l’esprit de clocher n’est pas qu’une vue de l’esprit  et elle limite les possibilités de partage …

Cependant, les rangs s’éclaircissaient au fil des ans, faute de gagner les nouvelles couches de retraités à ces activités BBV.  Aujourd’hui, la  ruralité comprend une petite minorité d’agriculteurs. Les villages ne se sont pas forcément dépeuplés : les anciennes fermes peuvent abriter  soit les héritiers de familles paysannes qui ont « gagné leur vie » ailleurs, soit des citadins attirés par la sérénité de la campagne. Encore qu’il y  ait des conflits larvés avec le chant matinal du coq, le gros tracteur et ses accessoires encombrant les routes, les nuisances olfactives des épandages de lisier de veaux ou porcs en batterie, à moins que ce ne soit les poules confinées par milliers dans un élevage…

Bref, la campagne du 21ème siècle n’est plus celle de 1976. Dans certaines localités, les Clubs ont su innover. Les curieux pourront le constater en visitant le site *. Il y  a cette activité  inédite et d’autres telles l’aquagym, la chorale, peinture et encadrement, sophrologie, occitan,  ateliers d’informatique, randonnées,  danse, etc …   Un souhait personnel issu de la fréquentation assidue de Kalé : création d’un atelier d’écriture  …

Reste maintenant à entrer de plein pied dans le 21ème siècle. Parce que reconnue « d’utilité publique » au niveau national, Générations Mouvement – appellation  adoptée en 2013 - , grâce à son implantation  de proximité – 78 clubs – le Conseil Départemental a considéré  que c’était un point d’appui  incontournable pour réduire la fracture numérique chez les seniors ( 61 000 personnes de plus de 65 ans  dans le département, soit un habitant sur quatre).  Moins de 10 % adhérent à des Clubs d’anciens.  Et ceci essentiellement  en zone rurale, sans doute en raison des origines : « les  aînés ruraux ».

En conclusion, est - ce utopique d’imaginer qu’avec l’initiation au numérique améliorant les possibilités de communication  et un projet  en cours d’équipement des Clubs et des adhérents en tablettes électroniques, notre mouvement qui se veut maintenant intergénérationnel puisse grandir ?