A - Histoire de fou

« Je viens de sonner chez moi et c'est un inconnu qui a répondu, »

Voilà ce que me déclara l'étrange individu assis en face de moi.

« Et où est le problème ? »
« C'était un inconnu ! »
« Oui certes, j'ai bien compris. Ce que je ne comprends pas c'est pourquoi vous avez sonné chez vous. »
« Pour entrer bien sûr. »
« Je m'en doute, mais encore. »
« J'avais perdu mes clés. »
« Voilà qui est beaucoup plus clair. Vous aviez perdu vos clés et vous avez sonné pour entrer, d'accord, mais où est le problème ? »
« Le problème c'est l'inconnu qui m'a ouvert. »
« Cet inconnu avait forcément été invité à entrer par quelqu'un qui habite avec vous non ? Donc qu'est-ce qui vous chagrine. Je trouve plutôt gentil qu'un inconnu se déplace pour répondre à la porte. »
« Non ! Pas du tout ! »
« Ca vous gênait que cet inconnu vous ouvre à la place d'un des membres de votre famille ? »
« Je n'ai pas de famille ! »
« Ouuuiiii ! Mais si vous n'avez pas de famille, pourquoi avez-vous sonné ? »
« Pour qu'on m'ouvre voyons, vous êtes sot où quoi ! »
« Restez poli voulez-vous, j'essaye de comprendre votre problème et la grosse bêtise qui en a découlé. Pourquoi sonner sachant que personne ne pouvait vous ouvrir ? »
« Comme ça pour le cas où ! »
« Pour le cas où quoi ? »
« Où on m'ouvrirait quand même ! »
« Mais voyons c'est impossible puisque vous venez de me dire que vous habitez seul, donc personne ne pouvait vous ouvrir c'est logique non ? »
« Oui, sauf si un inconnu était à la maison ! »
« Mais que ferait un inconnu chez vous s'il n'y a pas été invité ? »
« Allez savoir ! »
« C'est bien ce que j'aimerais ! »
« Qu'est-ce que vous aimeriez ? »
« Savoir pourquoi vous avez sonné pour entrer en vous attendant à ce qu'un inconnu que vous n'avez pas invité vous ouvre ? »
« Parce que cet inconnu n'est pas un inconnu ! »
« Je suis perdu, c'était un inconnu ou pas un inconnu ? Il faudrait être un peu plus clair ! »
« C'était un inconnu plus inconnu que mon inconnu habituel. »
« Vous vous foutez de moi là ? Vous voulez que nous pensions que vous êtes un fou ? »
« Mais vous m'embêtez à la fin, l'inconnu auquel je suis habitué me ressemble comme deux gouttes d'eau. »
« Dans ce cas ce n'est pas ou plus un inconnu. »
« Disons que c'est un inconnu connu. »
« Et cet inconnu connu a forcément vos clés pour entrer chez vous non ? »
« Probablement ! »
« Comment ça probablement, s'il rentre chez vous et qu'il vous ouvre c'est qu'il a pu entrer avec vos clés non ?
« Oui probablement. »
« Bon, passons. Je commence à avoir mal à la tête avec toutes vos dingueries. J'aimerais bien savoir maintenant ce qui s'est passé avec votre inconnu, ce matin. »
« Avec mon inconnu connu ou mon inconnu inconnu, soyez plus précis dans vos demandes je vous prie ! »

Alors là, ce dingue a eu raison de ma patience. Je me suis levé et j'ai hurlé :

« POURQUOI AVEZ-VOUS FLANQUE VOTRE POING DANS LA FIGURE DE CE MONSIEUR QUI VOUS AVAIT OUVERT ? »

« Parce que c'était l'inconnu inconnu ! Si ça avait été l'inconnu connu je lui aurais offert un verre. »

J'ai entendu mes collègues accourir de tout le commissariat, ils m'ont difficilement séparé de cet inconnu que j'étais en train d'étrangler. Une chose est sûre c'est que je ne veux pas qu'à l'HP on me donne la chambre à côté de ce fou !