A - Un avenir en rose

« La femme est l’avenir de l’homme », c’est ce que la jeune femme peut lire sur le fronton du Puerperium. Elle ne peut s’empêcher de ricaner. Et avant d’y entrer pour écrire une nouvelle page de son histoire et de celle de son peuple, elle se remémore les leçons des Mères.

Il fut un temps où les hommes trouvaient normal et juste d’imposer leur loi aux femmes. Ils en usaient et en abusaient. Bon c’est vrai que les Mères avaient précisé que tous n’étaient pas comme ça, mais même eux ne faisaient pas grand-chose pour que les choses évoluent.

Au fil des siècles, les femmes avaient tenté de s’imposer, elles réclamaient une égalité dans la différence, le respect, l’écoute et dans certains cas simplement le droit de vivre. Mais les mâles semblaient sourds à ces demandes qui semblaient pourtant raisonnables.

Alors, dans l’ombre où ils s’entêtaient à les confiner, les femmes cogitèrent.

L’évolution des sciences leur offrit la chance de rétablir l’équilibre de la balance. Les hommes dans leur grande suffisance avaient semblé oublier une chose. Si l’homme avait besoin de la femme pour faire naître des enfants, l’inverse n’était plus vrai. De l’homme n’étaient utiles que ses gamètes.

Les plus grandes chimistes et biologistes se rencontrèrent sous prétexte de réunions Tupperware et elles fomentèrent la révolution.

Elles commencèrent par braquer les banques de spermes. Puis elles mirent au point un virus ne s’attaquant qu’au chromosome Y, la sélection fut drastique, seules les hommes les plus « intéressants » pour leur force de travail ou leur génome en réchappèrent.

Maintenant la femme était bien devenue l’avenir de l’homme, peut-être pas celui envisagé par le poète mais à l’impossible nul n’est tenu.

Après une période de chaos, il faut bien reconnaître que l’homme tenta de se défendre comme un beau diable, il refusait de laisser la place, le matriarcat s’instaura.

Et maintenant, les femmes peuvent décider de procréer de manière artificielle ou plus artisanale, des hommes jeunes et sains étant mis à leur disposition dans les Puerperium et lorsqu’ils sont jugés trop âgés ils sont envoyés dans les usines ou dans les maisons de plaisir.

Une légère modification de l’ADN permet de limiter le nombre de naissances masculines au strict minimum pour renouveler correctement l’espèce et éviter les désagréments de naissances consanguines.

Bien sûr, ce que les anciennes civilisations nommaient instinct maternel en a pris un coup, mais il se peut que cet instinct n’ait été qu’une ruse de plus de l’homme pour garder la femme sous sa coupe.

Quoi qu’il en soit, la jeune fille franchit le seuil du Puerperium d’un pas décidé, un homme a été sélectionné pour elle et pendant les trois mois qui viennent elle a quartier libre pour s’amuser avec lui et procréer.

Lorsque l’enfant sera venu au monde, si c’est une fille, elle l’élèvera au sein de sa communauté. Si c’est un garçon, il sera remis à la pouponnière qui en fera un bon pion bien éduqué.

Quant à elle reprendra sa vie de femme libérée dans le meilleur des mondes.