A - La lettre
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A - La lettre
La jeune femme s’assoit sur le banc face à la rivière. Le coeur gros elle sort de son réticule une lettre, lue et relue.
Elle reste un moment le regard fixé sur l’eau grise qui s’écoule paresseusement indifférente au fracas de la vie humaine.
Puis, doucement avec infiniment de délicatesse, elle déplie la feuille de papier et se plonge dans ses mots.
« Ma tendre amie.
Dans mon coeur je garde précieusement ces instants de bonheur que nous avons volés à ce triste présent.
Au milieu de l’enfer je ne garde en tête qu’une seule pensée, un seul rêve m'asseoir sur un banc cinq minutes avec toi, ce banc sur lequel tu étais assise, si belle dans ta robe blanche, aussi blanche que les marguerites qui poussaient autour de nous en ce bel été où tu m’as dit oui enfin.
Dans mon coeur et dans mon corps vivent à jamais ce don de toi que tu m’as fait. Mon épouse, que ce mot est merveilleux. Je le porte comme un talisman.
Du plus profond de la boue qui tente de me submerger, au milieu du fracas des canons, je ne vois que la tendresse de tes yeux, je ne sens que la douceur de ta peau, je n’entends que la musique de ta voix, je ne bois que la fraîcheur de tes lèvres.
Oh mon aimée, comme je maudis la folie des hommes qui me garde si loin de toi. Je t’imagine fière, droite et si tendre ta main dans la mienne.
Lorsque le monde autour de moi se déchaîne et que la pluie est rouge, je la vois qui se tend vers moi ta douce main et mes doigts viennent faire tourner autour de mon annulaire cette bague que tu m’as donnée et qui m’est une tendre chaîne.
Bientôt, j’en suis sûr, toute cette folie s’achèvera et je reviendrai près de toi. Alors nous pourrons à nouveau nous rendre auprès de la rivière et sur ce banc tant chéri nous renouvellerons notre serment. Et plus jamais je ne te quitterai.
Adrien
Ton époux dévoué et aimant »
La jeune femme soupire. Une de ses mains se pose, délicate, son ventre arrondi. Elle sent que l’enfant vient se nicher contre elle, comme un chat qui recherche une caresse.
De l’autre, elle serre contre son coeur cette lettre à laquelle elle n’a pas encore répondu. Elle ne sait pas si elle doit lui annoncer qu’un enfant va bientôt venir bénir leur union. Cette nouvelle va-t-elle le rendre plus fort ou pas ?
Une plainte s’échappe de ses lèvres. Une larme se forme et roule sur sa joue.
Elle se sent si lâche. Elle s’est échappée de la maison ce matin lorsque par la fenêtre elle a vu le Maire s’approcher, la mine défaite.
Elle n’a pas voulu savoir, pas encore du moins, s’il venait pour elle. Elle sait que c’est mal, mais elle ne peut s’empêcher d’espérer que c’était pour une autre qu’il se déplaçait. Elle l’a croisé si souvent devant jouer à son corps défendant le rôle de l’oiseau de mauvaise augure.
Alors elle a fui, voulant communier avec son aimé peut-être pour la dernière fois. Sous ses doigts l’enfant glisse. Sur son épaule il lui semble sentir une tendre pression.
Et tout à coup les cloches de toutes les églises se mettent à sonner, des cris de joie retentissent en ce 11 novembre 1918.
Elle reste un moment le regard fixé sur l’eau grise qui s’écoule paresseusement indifférente au fracas de la vie humaine.
Puis, doucement avec infiniment de délicatesse, elle déplie la feuille de papier et se plonge dans ses mots.
« Ma tendre amie.
Dans mon coeur je garde précieusement ces instants de bonheur que nous avons volés à ce triste présent.
Au milieu de l’enfer je ne garde en tête qu’une seule pensée, un seul rêve m'asseoir sur un banc cinq minutes avec toi, ce banc sur lequel tu étais assise, si belle dans ta robe blanche, aussi blanche que les marguerites qui poussaient autour de nous en ce bel été où tu m’as dit oui enfin.
Dans mon coeur et dans mon corps vivent à jamais ce don de toi que tu m’as fait. Mon épouse, que ce mot est merveilleux. Je le porte comme un talisman.
Du plus profond de la boue qui tente de me submerger, au milieu du fracas des canons, je ne vois que la tendresse de tes yeux, je ne sens que la douceur de ta peau, je n’entends que la musique de ta voix, je ne bois que la fraîcheur de tes lèvres.
Oh mon aimée, comme je maudis la folie des hommes qui me garde si loin de toi. Je t’imagine fière, droite et si tendre ta main dans la mienne.
Lorsque le monde autour de moi se déchaîne et que la pluie est rouge, je la vois qui se tend vers moi ta douce main et mes doigts viennent faire tourner autour de mon annulaire cette bague que tu m’as donnée et qui m’est une tendre chaîne.
Bientôt, j’en suis sûr, toute cette folie s’achèvera et je reviendrai près de toi. Alors nous pourrons à nouveau nous rendre auprès de la rivière et sur ce banc tant chéri nous renouvellerons notre serment. Et plus jamais je ne te quitterai.
Adrien
Ton époux dévoué et aimant »
La jeune femme soupire. Une de ses mains se pose, délicate, son ventre arrondi. Elle sent que l’enfant vient se nicher contre elle, comme un chat qui recherche une caresse.
De l’autre, elle serre contre son coeur cette lettre à laquelle elle n’a pas encore répondu. Elle ne sait pas si elle doit lui annoncer qu’un enfant va bientôt venir bénir leur union. Cette nouvelle va-t-elle le rendre plus fort ou pas ?
Une plainte s’échappe de ses lèvres. Une larme se forme et roule sur sa joue.
Elle se sent si lâche. Elle s’est échappée de la maison ce matin lorsque par la fenêtre elle a vu le Maire s’approcher, la mine défaite.
Elle n’a pas voulu savoir, pas encore du moins, s’il venait pour elle. Elle sait que c’est mal, mais elle ne peut s’empêcher d’espérer que c’était pour une autre qu’il se déplaçait. Elle l’a croisé si souvent devant jouer à son corps défendant le rôle de l’oiseau de mauvaise augure.
Alors elle a fui, voulant communier avec son aimé peut-être pour la dernière fois. Sous ses doigts l’enfant glisse. Sur son épaule il lui semble sentir une tendre pression.
Et tout à coup les cloches de toutes les églises se mettent à sonner, des cris de joie retentissent en ce 11 novembre 1918.
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Martine27
Martine27- Humeur : Carpe diem ou Souris quand même
Re: A - La lettre
Magnifique. Emouvant. Et tellement humain, de fuir pour ne pas savoir, ne pas être confronté à la réalité. J'espère que le maire venait pour autre chose et qu'Adrien est rentré entier.
Daboum- Humeur : jusqu'ici, ça va
Re: A - La lettre
Merci Daboum. Je ne sais pas, je laisse chacun se faire une opinion. Dans ma famille nous avons eu beaucoup de chance, même si certains sont passé par la case prisonniers de guerre mes arrières-grands-pères et grands-pères sont revenus.
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Martine27
Martine27- Humeur : Carpe diem ou Souris quand même
Re: A - La lettre
Très émouvant ton texte Martine.
Il nous laisse imaginer la fin et c'est une vraie prouesse. Ton imagination nous régale une fois de plus et rendre hommage aux soldats de la grande guerre est une excellente idée .
Il nous laisse imaginer la fin et c'est une vraie prouesse. Ton imagination nous régale une fois de plus et rendre hommage aux soldats de la grande guerre est une excellente idée .
Zephyrine- Humeur : Parfois bizarre
RE A : La lettre
Bravo Martine, tu as su voir la douleur de cette jeune femme heureusement réconfortée par cet enfant qui grandit en elle.
automne- Humeur : égale
Re: A - La lettre
C’est superbe . Tout est beau, l’histoire, le lieu et ta plume. Une magnifique texte
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Bonjour Invité, je suis heureuse de te compter parmi les Kaléïdoplumiens
Admi......ratrice de vos mots !!!!!.
Admin- Admin
- Humeur : Concentrée
Re: A - La lettre
J'ai envie d'y croire, que le Maire ne venait pas pour elle, qu'Adrien est revenu sain et sauf, que le bonheur a enfin pu reprendre le dessus
silhène- Humeur : positive, autant que possible
Re: A - La lettre
Ce que j'aime dans ton texte, c'est que tu racontes une histoire et tu la racontes si bien, avec émotion, laissant la fin ouverte pour que chacun imagine la sienne.
Myrte- Humeur : Curieuse
Re: A - La lettre
Merci à toutes ! Très franchement, comme souvent, je me demande encore d'où m'est venue cette histoire et surtout pourquoi Adrien, ce n'est pas un prénom qui figure dans mon top ten et personne dans ma famille ne l'a porté ? Etrange résurgence du passé peut-être.
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Martine27
Martine27- Humeur : Carpe diem ou Souris quand même
Re: A - La lettre
Superbe texte avec une fin ouverte qui sent l"espoir ! L'idée de la lettre renforce ton écriture et le lien avec le 11 novembre est absolument parfait BRAVO !!!
Amanda- Humeur : positivement drôle
Martine27- Humeur : Carpe diem ou Souris quand même
Re: A - La lettre
Un texte émouvant pour lequel personnellement je choisis une fin heureuse. Une belle histoire contée dans une belle écriture.
Virgul- Humeur : Optimiste
Martine27- Humeur : Carpe diem ou Souris quand même
Re: A - La lettre
C'est une superbe histoire qui m'a tenu en haleine jusqu'au bout, puis la fin contre toute attente.
Comme Virgul, je choisis est la destinée heureuse.
Comme Virgul, je choisis est la destinée heureuse.
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Quelle noblesse d'avoir un ami, mais combien plus noble d'être un ami.
- Richard Wagner -
- Richard Wagner -
trainmusical- Humeur : la vie est belle
Re: A - La lettre
Tu signes ici un texte magnifique... Qui remue l'estomac !!!! J'aime à penser, moi aussi, que la visite du maire n'était pas pour elle.
Encore bravo !!!!!
Encore bravo !!!!!
Xavier Eblo- Humeur : besoin de calme et de grand air
Re: A - La lettre
J'ai retouvé toutes les lettres que mon grand oncle a écrites à sa famille quand il était sur le front en 14-18 (et où il est mort quelques mois seulement avant l'armistice). Je retrouve dans ta lettre toute cette ambiance et cette façon d'écrire.
Je suis simplement étonnée qu'Adrien écrive "Chère amie" alors que c'est sa femme
Je suis simplement étonnée qu'Adrien écrive "Chère amie" alors que c'est sa femme
Sherkane
Re: A - La lettre
Merci à vous tous, c'est bien que vous soyez des optimistes
@ Amanda : Ce doit être merveilleux d'avoir ces lettres, même si hélas ton grand-oncle n'en est pas revenu. Pour mon Adrien, il écrit ma tendre amie, il m'a semblé que ce début faisait plus "romantique"
@ Amanda : Ce doit être merveilleux d'avoir ces lettres, même si hélas ton grand-oncle n'en est pas revenu. Pour mon Adrien, il écrit ma tendre amie, il m'a semblé que ce début faisait plus "romantique"
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Martine27
Martine27- Humeur : Carpe diem ou Souris quand même
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