A- dans le sac
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Myrte
Zephyrine
alainx
sprite!
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A- dans le sac
Il faisait encore sombre lorsque j’ai quitté la maison. J’avais vérifié la veille que tout était bien dans mon sac. Comme tous ces derniers jours, j’allais parcourir tellement de distance pendant la journée qu’il n’était pas question de pouvoir revenir en arrière si j’oubliais quoi que ce soit.
Certains métiers nécessitent que l’on soit hyper minutieux sinon trop de gens en pâtissent. Mais je l’avais choisi ce métier, par amour. Que dis-je par passion. Depuis que très jeune encore, ma mère m’avait offert la possibilité d’explorer ces connaissances par moi-même et grâce à sa complicité j’avais eu tout le loisir d’explorer donc en finissant mes études, ma vie était comme qui dirait, toute tracée.
J’avais décidé de ne pas demeurer en ville où bien sûre, la vie aurait sans doute été beaucoup plus facile. Mais quand on a quelque chose vraiment dans la peau, il faut apprendre à suivre son destin. Même si ce n’est pas toujours facile. Même quand il faut se lever et partir de très bon matin et rentrer très tard, en sachant qu’il faudra remettre ça dès le lendemain et les jours à suivre.
On appelle bien ça une vocation, ce penchant impérieux qui vous pousse malgré vous, cet appel quasiment du divin même si je demeure fortement agnostique, bref, ce genre d’inclination qui exige malgré soi dévouement et désintéressement. Mais que voulez-vous, si je ne m’y soumettais pas, qui d’autre le ferai à ma place ?
Il y aurait encore tant à dire sur ces petites communautés du Colorado dispersées sur plus de 1000 km2 et si peu de docteurs pour subvenir à leurs besoins. Pourtant dans les ranchs les accidents arrivent plus vite qu’on ne peut l’imaginer : les coups de pied de cheval sont assez fréquents et certains sont mortels. Deux semaines en arrière une fillette de quatre ans en a perdu un œil. Il avait fallu la faire transporter à l’hôpital de Denver. En fait, c’est surtout des enfants que je vois pendant ces déplacements journaliers. On appelle plus souvent pour eux. Les adultes demeurent plus fatalistes pour leurs propres sorts : la mort n’est jamais très loin et avant-hier, c’est un prêtre pour les derniers offices, qu’on a appelé car une fois la situation bien évaluée, il a fallu se rendre à l’évidence, il n’y a avait plus rien à faire.
Il ne me reste plus que quelques semaines à accompagner le Docteur Ceriani dans ses tournées quotidiennes, mais je tiens à essayer d’utiliser la photographie pour montrer la vie autant que possible par les yeux de ceux que j’observe, comme j’ai appris à le faire pendant la guerre. Certains appelle ça de la photographie humaniste. Moi, William Eugène Smith, je veux simplement ‘rendre compte’. Les premières semaines je n’ai pas mis de pellicules dans mon appareil pour qu’Ernest s’habitue au déclic et finisse par ne plus y faire attention. En tout cas, les clichés obtenus de ‘la vie réelle’, sur le tas, sans falsification ni trucage, j’espère qu’elle vont parler longtemps, autant sinon bien plus fort que les mots. Une vocation, je vous dis!
https://www.life.com/history/w-eugene-smiths-landmark-photo-essay-country-doctor/
Certains métiers nécessitent que l’on soit hyper minutieux sinon trop de gens en pâtissent. Mais je l’avais choisi ce métier, par amour. Que dis-je par passion. Depuis que très jeune encore, ma mère m’avait offert la possibilité d’explorer ces connaissances par moi-même et grâce à sa complicité j’avais eu tout le loisir d’explorer donc en finissant mes études, ma vie était comme qui dirait, toute tracée.
J’avais décidé de ne pas demeurer en ville où bien sûre, la vie aurait sans doute été beaucoup plus facile. Mais quand on a quelque chose vraiment dans la peau, il faut apprendre à suivre son destin. Même si ce n’est pas toujours facile. Même quand il faut se lever et partir de très bon matin et rentrer très tard, en sachant qu’il faudra remettre ça dès le lendemain et les jours à suivre.
On appelle bien ça une vocation, ce penchant impérieux qui vous pousse malgré vous, cet appel quasiment du divin même si je demeure fortement agnostique, bref, ce genre d’inclination qui exige malgré soi dévouement et désintéressement. Mais que voulez-vous, si je ne m’y soumettais pas, qui d’autre le ferai à ma place ?
Il y aurait encore tant à dire sur ces petites communautés du Colorado dispersées sur plus de 1000 km2 et si peu de docteurs pour subvenir à leurs besoins. Pourtant dans les ranchs les accidents arrivent plus vite qu’on ne peut l’imaginer : les coups de pied de cheval sont assez fréquents et certains sont mortels. Deux semaines en arrière une fillette de quatre ans en a perdu un œil. Il avait fallu la faire transporter à l’hôpital de Denver. En fait, c’est surtout des enfants que je vois pendant ces déplacements journaliers. On appelle plus souvent pour eux. Les adultes demeurent plus fatalistes pour leurs propres sorts : la mort n’est jamais très loin et avant-hier, c’est un prêtre pour les derniers offices, qu’on a appelé car une fois la situation bien évaluée, il a fallu se rendre à l’évidence, il n’y a avait plus rien à faire.
Il ne me reste plus que quelques semaines à accompagner le Docteur Ceriani dans ses tournées quotidiennes, mais je tiens à essayer d’utiliser la photographie pour montrer la vie autant que possible par les yeux de ceux que j’observe, comme j’ai appris à le faire pendant la guerre. Certains appelle ça de la photographie humaniste. Moi, William Eugène Smith, je veux simplement ‘rendre compte’. Les premières semaines je n’ai pas mis de pellicules dans mon appareil pour qu’Ernest s’habitue au déclic et finisse par ne plus y faire attention. En tout cas, les clichés obtenus de ‘la vie réelle’, sur le tas, sans falsification ni trucage, j’espère qu’elle vont parler longtemps, autant sinon bien plus fort que les mots. Une vocation, je vous dis!
https://www.life.com/history/w-eugene-smiths-landmark-photo-essay-country-doctor/
sprite!- Humeur : variable
Re: A- dans le sac
On dirait que les médecins ont la grande côte dans cette consigne !
Intéressant le reportage de « Life »
le bon docteur américain : héros de l'ordinaire. Altruiste, dévouée, désintéressé, ne courant pas après les dollars (ça existe vraiment un américain qui n'est pas avide de dollars ?)
Plus tard « Paris-Match » ne fera que suivre cette pente patriotique !
Ça change d'aujourd'hui où chaque décision d'un médecin est contestée systématiquement par le patient et ses confrères.
Quoi ? Mon confrère vous a prescrit « ça » ? Vous êtes sûr qu'il a un diplôme de médecine ?
(j'ai entendu cette phrase personnellement. Je ne m'étendrai pas sur le fait que ledit confrère m'a donné un autre traitement... qui m'a amené à l'hôpital plusieurs jours après ! Je sais maintenant lequel des deux n'avait pas de diplôme de médecine).
Les procès en responsabilité médicale ont le vent en poupe ! Paraît que ça peut rapporter gros au patient pas content !
Intéressant le reportage de « Life »
le bon docteur américain : héros de l'ordinaire. Altruiste, dévouée, désintéressé, ne courant pas après les dollars (ça existe vraiment un américain qui n'est pas avide de dollars ?)
Plus tard « Paris-Match » ne fera que suivre cette pente patriotique !
Ça change d'aujourd'hui où chaque décision d'un médecin est contestée systématiquement par le patient et ses confrères.
Quoi ? Mon confrère vous a prescrit « ça » ? Vous êtes sûr qu'il a un diplôme de médecine ?
(j'ai entendu cette phrase personnellement. Je ne m'étendrai pas sur le fait que ledit confrère m'a donné un autre traitement... qui m'a amené à l'hôpital plusieurs jours après ! Je sais maintenant lequel des deux n'avait pas de diplôme de médecine).
Les procès en responsabilité médicale ont le vent en poupe ! Paraît que ça peut rapporter gros au patient pas content !
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"Écrire, c'est brûler vif, mais aussi renaître de ses cendres. "
Blaise Cendrars
ICI : Le Blog d'AlainX
alainx- Humeur : ça va ! et vous ?
Re: A- dans le sac
La photo est bien celle d'un docteur et meme du vrai Docteur Cierani. Les toubibs anglais avaient aussi ce genre de sac jusque dans les années 80s.
sprite!- Humeur : variable
Re: A- dans le sac
Eh oui, les médecins ont du succès cette semaine mais les textes sont différents (heureusement).
Toi, Sprite, tu nous emmènes loin et comme partout la médecine a bien changé.
Il est loin le temps où le médecin était celui en qui on avait pleine confiance.
Un jour une accouchée sortant de la clinique où mon mari exerçait a vu venir vers elle un avocat qui lui a demandé si elle était certaine que tout s’était passé normalement, car sinon il pouvait lui proposer ses services...
Ça se passait dans les années 1980!
Toi, Sprite, tu nous emmènes loin et comme partout la médecine a bien changé.
Il est loin le temps où le médecin était celui en qui on avait pleine confiance.
Un jour une accouchée sortant de la clinique où mon mari exerçait a vu venir vers elle un avocat qui lui a demandé si elle était certaine que tout s’était passé normalement, car sinon il pouvait lui proposer ses services...
Ça se passait dans les années 1980!
Zephyrine- Humeur : Parfois bizarre
Re: A- dans le sac
J'ai pensé dès le début qu'il s'agissait d'une histoire de docteur et non ! C'est un photographe ! Bravo pour la surprise et surtout merci pour le document. J'avais déjà trouvé magnifique la photo de la consigne mais j'en ai découvert encore bien d'autres ! Je suppose que le photographe devait demander le consentement des patients car, de nos jours, ça ne serait pas possible autrement !
Myrte- Humeur : Curieuse
Re: A- dans le sac
merci Myrte, je pensais que j'avais raté mon coup et qu'on ne comprenais pas qu'en fait je parle bien du photographe. J'ai peut-être un peu forcé sur la dose dans ma comparaison.
Et oui, Zephirine, les gens s'attendent toujours a des miracles de la part des médecins et des soignants, et la culture des procès pour un oui pour un non a amené une drôle d'atmosphere au sein de la santé. Le stress du a la peur de l'erreur fait d'enormes ravages.
@Alain, oui je pense qu'il y a beaucoup d'americains 'moyens' qui ne sont pas motives que par les dollars, mais cette image la est moins exportée.
Et oui, Zephirine, les gens s'attendent toujours a des miracles de la part des médecins et des soignants, et la culture des procès pour un oui pour un non a amené une drôle d'atmosphere au sein de la santé. Le stress du a la peur de l'erreur fait d'enormes ravages.
@Alain, oui je pense qu'il y a beaucoup d'americains 'moyens' qui ne sont pas motives que par les dollars, mais cette image la est moins exportée.
sprite!- Humeur : variable
Re: A- dans le sac
C'est sympa l'histoire racontée de l'autre côté de l'appareil photo
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Martine27
Martine27- Humeur : Carpe diem ou Souris quand même
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