A: Le roi des Tamarins
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A: Le roi des Tamarins
Des nappes de brumes s'immisçaient parmi les arbres. Bois noir, bois d'olive, Camphriers et Tamarins peuplaient cette forêt que nous foulions de nos pas depuis la nuit tombée. Mon papy et moi étions partis de sa maison, située à plusieurs kilomètres en contre-bas. Cela faisait plusieurs heures que nous marchions, naviguant prudemment entre ces géants aux bras ridés, nous dissimulant les rayons de la pleine lune que nous savions au dessus, dans un ciel nu et dégagé.
Mon papy, malgré son grand âge, marchait d'un pas souple, sûr et déterminé. À le suivre si tard, il ne m'avais guère forcé. La raison de cette excursion avait suffit. À peine me l'avait-il proposé que chaussures, pantalon et k-way avaient été attrapé et enfilé. Nous allions à la recherche, ou la rencontre, du roi des Tamarins, qui siégeait au cœur de la forêt et il m'avait promis un instant inoubliable, magique et dont personne autre que lui ne connaissait.
Je peinais par moment à suivre la cadence qu'il m'imposait. Mon vieux papy avait la forme et il aimait me répéter, souvent, "vieillir, ce n'est pas un boulot pour les poules mouillées". Mon papy n'en était pas une. Il était peut-être rabougri, ronchon de temps en temps et d'un caractère un peu grinçant, il restait un vieux monsieur en pleine santé, d'une énergie débordante et d'un savoir hors du commun. Il était mon encyclopédie à moi dont chaque moment passé à ses cotés était une page que je tournais avec respect.
Arrivant proche de notre destination, il me fit signe de marcher plus doucement, d'être plus discret, d'ouvrir les yeux, de faire davantage attention. Avec douceur, il écarta quelques branches du sentier. Ses gestes et ses pas restaient délicats, silencieux. Il réajusta ses fines lunettes sur son nez et se dissimulant derrière un gros buisson, il m'ordonna d'une main d'approcher. Je compris que nous étions arrivés. Derrière notre bouclier de feuilles et à une vingtaine de mètres face à nous se tenait le roi des Tamarins, ce géant ridé trônant au cœur de ses sujets.
Les rayons de lune l'éclairant et une très légère brise l'agitant, le seigneur s'élevait, fier, presque droit, imposant sa présence de sa silhouette hors norme, puissante, enivrante. Ses bras, bien que d'apparence décharnés, remuaient sous les caresses de ce léger vent et leurs feuilles, tremblantes, nous chuchotaient à l'oreille d'approcher. Ce que nous fîmes, mon papy me précédant, de sa démarche souple, lente, presque féline. Nous restâmes à ses pieds, devant ses racines que je devinais s'enfoncer dans la terre, sous les nôtres. Et mon papy me présenta à lui comme son petit fils et le comprenant alors sans difficulté, comme le futur gardien de la forêt.
De manière inattendue, me surprenant, une branche devant moi se plia et vint jusqu'à ma joue, la touchant, m'offrant une caresse que je cru un instant irréelle, sortie d'un songe de la part d'un dieu, d'une déesse. Je perçu dans ce toucher de la douceur et de la chaleur, de la satisfaction et de la joie. J'entendis comme des profondeurs un grondement, sa voix de roi, témoignant son approbation envers le choix de son nouveau gardien. Et je me senti fier, honoré, rempli de respect pour cette mission qui m'était alors offert. Nous restâmes longtemps à nous observer, à discuter à notre manière, peau à écorce, écorce à peau, à profiter l'un de l'autre tout simplement.
Bien plus tard, sur le chemin du retour, nous gardâmes le silence mon papy et moi, mais devinais sans peine le sourire illuminer son visage. Même ses rides semblaient sourire à travers cette fin de nuit et bien que je ne puisse le voir complètement, je vis pourtant des larmes y briller comme si une étape était passée. Son regard resta droit lorsque je lui pris la main, tout autant par réconfort que par respect. Nous n'eûmes pas à parler. Tout avait été dit, tout avait été fait.
Je comprenais à présent un autre de ses secrets bien gardés et c'est main dans la main, de gardien à gardien, que nos pas étaient acclamés sous les branches des Bois noir, des Bois d'olive, des Camphriers et des Tamarins sur le chemin du retour, le long du sentier qui nous ramenait à la maison. La maison de mon papy, qui resterait toujours pour moi et pour longtemps, le vrai gardien de la forêt.
Mon papy, malgré son grand âge, marchait d'un pas souple, sûr et déterminé. À le suivre si tard, il ne m'avais guère forcé. La raison de cette excursion avait suffit. À peine me l'avait-il proposé que chaussures, pantalon et k-way avaient été attrapé et enfilé. Nous allions à la recherche, ou la rencontre, du roi des Tamarins, qui siégeait au cœur de la forêt et il m'avait promis un instant inoubliable, magique et dont personne autre que lui ne connaissait.
Je peinais par moment à suivre la cadence qu'il m'imposait. Mon vieux papy avait la forme et il aimait me répéter, souvent, "vieillir, ce n'est pas un boulot pour les poules mouillées". Mon papy n'en était pas une. Il était peut-être rabougri, ronchon de temps en temps et d'un caractère un peu grinçant, il restait un vieux monsieur en pleine santé, d'une énergie débordante et d'un savoir hors du commun. Il était mon encyclopédie à moi dont chaque moment passé à ses cotés était une page que je tournais avec respect.
Arrivant proche de notre destination, il me fit signe de marcher plus doucement, d'être plus discret, d'ouvrir les yeux, de faire davantage attention. Avec douceur, il écarta quelques branches du sentier. Ses gestes et ses pas restaient délicats, silencieux. Il réajusta ses fines lunettes sur son nez et se dissimulant derrière un gros buisson, il m'ordonna d'une main d'approcher. Je compris que nous étions arrivés. Derrière notre bouclier de feuilles et à une vingtaine de mètres face à nous se tenait le roi des Tamarins, ce géant ridé trônant au cœur de ses sujets.
Les rayons de lune l'éclairant et une très légère brise l'agitant, le seigneur s'élevait, fier, presque droit, imposant sa présence de sa silhouette hors norme, puissante, enivrante. Ses bras, bien que d'apparence décharnés, remuaient sous les caresses de ce léger vent et leurs feuilles, tremblantes, nous chuchotaient à l'oreille d'approcher. Ce que nous fîmes, mon papy me précédant, de sa démarche souple, lente, presque féline. Nous restâmes à ses pieds, devant ses racines que je devinais s'enfoncer dans la terre, sous les nôtres. Et mon papy me présenta à lui comme son petit fils et le comprenant alors sans difficulté, comme le futur gardien de la forêt.
De manière inattendue, me surprenant, une branche devant moi se plia et vint jusqu'à ma joue, la touchant, m'offrant une caresse que je cru un instant irréelle, sortie d'un songe de la part d'un dieu, d'une déesse. Je perçu dans ce toucher de la douceur et de la chaleur, de la satisfaction et de la joie. J'entendis comme des profondeurs un grondement, sa voix de roi, témoignant son approbation envers le choix de son nouveau gardien. Et je me senti fier, honoré, rempli de respect pour cette mission qui m'était alors offert. Nous restâmes longtemps à nous observer, à discuter à notre manière, peau à écorce, écorce à peau, à profiter l'un de l'autre tout simplement.
Bien plus tard, sur le chemin du retour, nous gardâmes le silence mon papy et moi, mais devinais sans peine le sourire illuminer son visage. Même ses rides semblaient sourire à travers cette fin de nuit et bien que je ne puisse le voir complètement, je vis pourtant des larmes y briller comme si une étape était passée. Son regard resta droit lorsque je lui pris la main, tout autant par réconfort que par respect. Nous n'eûmes pas à parler. Tout avait été dit, tout avait été fait.
Je comprenais à présent un autre de ses secrets bien gardés et c'est main dans la main, de gardien à gardien, que nos pas étaient acclamés sous les branches des Bois noir, des Bois d'olive, des Camphriers et des Tamarins sur le chemin du retour, le long du sentier qui nous ramenait à la maison. La maison de mon papy, qui resterait toujours pour moi et pour longtemps, le vrai gardien de la forêt.
Dernière édition par Xavier Eblo le Dim 31 Oct 2021 - 10:58, édité 1 fois
Xavier Eblo- Humeur : besoin de calme et de grand air
Re: A: Le roi des Tamarins
J’ai beaucoup aimé ton histoire simple mais très bien racontée.
J’ai particulièrement apprécié le passage où tu décris ton Papy. Quelle belle complicité entre vous deux et la forêt !
Je suis heureuse de te retrouver sur Kalé !
J’ai particulièrement apprécié le passage où tu décris ton Papy. Quelle belle complicité entre vous deux et la forêt !
Je suis heureuse de te retrouver sur Kalé !
Zephyrine- Humeur : Parfois bizarre
Re: A: Le roi des Tamarins
Quelle belle histoire, une sorte de conte avec ce roi des Tamarins...
Tu racontes tellement bien, tu te suivons pas à ,pas, fascinés par la personnalité de ce Papy hors normes.
Tu mesures ta chance, tu joues le jeu !
Excellent texte Xavier, je retrouve tes mots avec plaisir !
Tu racontes tellement bien, tu te suivons pas à ,pas, fascinés par la personnalité de ce Papy hors normes.
Tu mesures ta chance, tu joues le jeu !
Excellent texte Xavier, je retrouve tes mots avec plaisir !
Amanda- Humeur : positivement drôle
Re: A: Le roi des Tamarins
Quel beau texte avec de belles descriptions dans cette forêt exotique et cette relation entre le grand-père et le petit fils. J'ai aimé le passage où l'enfant dialogue avec l'arbre personnifié.
Myrte- Humeur : Curieuse
Re: A: Le roi des Tamarins
Quelle jolie histoire !
J'aurais aimé me promener ainsi avec mon grand-père au royaume des Tamarins
J'aurais aimé me promener ainsi avec mon grand-père au royaume des Tamarins
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Ne méprisez la sensibilité de personne. La sensibilité de chacun, c'est son génie.
(Charles Baudelaire)
FrançoiseB- Humeur : Positive
Martine27- Humeur : Carpe diem ou Souris quand même
Re: A: Le roi des Tamarins
Merci à vous toutes!!! C 'est toujours une grande satisfaction lorsqu'un texte plait!!!!
Et pour la petite histoire, le roi des Tamarins existe réellement... sur l'ile de la Réunion
Et pour la petite histoire, le roi des Tamarins existe réellement... sur l'ile de la Réunion
Xavier Eblo- Humeur : besoin de calme et de grand air
Re: A: Le roi des Tamarins
Bois noir, bois d'olive, camphriers, tamarins... j'ai regardé sur Internet. ce sont des arbres présents à l'ile de la Réunion. C'est là bas que tu nous emmènes avec ton texte?
J'aime beaucoup cette histoire. Ce lien entre les arbres et les gardiens de la forêt. Dommage que tous les hommes n'aient pas cette vision là
J'aime beaucoup cette histoire. Ce lien entre les arbres et les gardiens de la forêt. Dommage que tous les hommes n'aient pas cette vision là
Sherkane
Re: A: Le roi des Tamarins
Arf Xavier Eblo, je viens de voir ton commentaire précédent! On est bien à l'Ile de la Réunion!!
Sherkane
Re: A: Le roi des Tamarins
Deux raisons de ma joie:
1. Le grand plaisir de te relire parmi nous, c'est très bien.
2. J'aime beaucoup ton texte, il est superbe.
Excellente description de chaque pas, jusqu'à la vue de ce "géant ridé trônant au cœur de ses sujets", puis les instants au pied de l'arbre.
C'est beau aussi quand tu racontes le retour dont ce magnifique passage:
1. Le grand plaisir de te relire parmi nous, c'est très bien.
2. J'aime beaucoup ton texte, il est superbe.
Excellente description de chaque pas, jusqu'à la vue de ce "géant ridé trônant au cœur de ses sujets", puis les instants au pied de l'arbre.
C'est beau aussi quand tu racontes le retour dont ce magnifique passage:
Xavier Eblo a écrit:Bien plus tard, sur le chemin du retour, nous gardâmes le silence mon papy et moi, mais devinais sans peine le sourire illuminer son visage. Même ses rides semblaient sourire à travers cette fin de nuit et bien que je ne puisse le voir complètement, je vis pourtant des larmes y briller comme si une étape était passée.
Il existe également au Madagascar où il est vénéré, juste?Xavier Eblo a écrit:Et pour la petite histoire, le roi des Tamarins existe réellement... sur l'ile de la Réunion
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Quelle noblesse d'avoir un ami, mais combien plus noble d'être un ami.
- Richard Wagner -
- Richard Wagner -
trainmusical- Humeur : la vie est belle
Re: A: Le roi des Tamarins
J'aime beaucoup la magie de ton texte et le passage du relai, entre le papy qui enseigne, et le gamin qui apprend.
Une belle histoire....
Une belle histoire....
silhène- Humeur : positive, autant que possible
Re: A: Le roi des Tamarins
À Sherkane: effectivement, cette histoire se déroule dans la forêt des Tamarins... sur l'ile de la Réunion.
À Trainmusical: oui, le Tamarin, ou le Tamarinier, existe également à Madagascar mais à ma connaissance, il n'y a pas de Roi là-bas. (Je me doute quand même qu'il doit bien y avoir de très vieux arbres!!). Et c'est une espèce qui est encore vénérée par certaines tribus.
À Trainmusical: oui, le Tamarin, ou le Tamarinier, existe également à Madagascar mais à ma connaissance, il n'y a pas de Roi là-bas. (Je me doute quand même qu'il doit bien y avoir de très vieux arbres!!). Et c'est une espèce qui est encore vénérée par certaines tribus.
Xavier Eblo- Humeur : besoin de calme et de grand air
Re: A: Le roi des Tamarins
Je rejoins tout ce qui a été dit précédemment, j'aime ton évocation de la Réunion, le parcours que tu nous décris, cette sorte de conte dans lequel je me suis laissée emmener, un bon moment de lecture
Plumentête- Humeur : optimiste parfois sceptique
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