A. Chanson des ondes
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A. Chanson des ondes
C’est avec le vieux poste de radio en bois qui trônait au salon dans la maison de Marrakech que la musique et les chansons sont entrées dans ma vie de petite fille. Mon père tournait le gros bouton en bakélite crème et un oeil vert s’allumait, puis, après un temps de chauffe, le son apparaissait. Assise dans un des fauteuils en skaï orange, j’écoutais tout, la musique classique que mon père préférait et les chansons d’adultes de l’époque. Les enfants du Pirée, ce port du bout du monde que le soleil inonde de ses reflets dorés me faisait rêver et il y avait un enfant, deux enfants, trois enfants, je savais compter au moins jusqu’à trois. Allez venez Milord et les airs que ma mère fredonnait dans la cuisine se mélangent dans ma mémoire. J’étais médusée face à ces voix mystérieuses, venues d’un lointain ailleurs et transmises par je ne savais quelle magie.
Un jour, mon père acheta un tourne-disque Teppaz dans son élégante mallette en cuir vert foncé. Le peu de disques que nous possédions à l’époque étaient souvent des cadeaux : un disque d’accordéon pour mon père qui en jouait, des chants de Noël, un disque de jazz à Honolulu, Guy Mitchel (que personne ne connaissait), Marisol que j’avais eu pour me consoler d’une prise de sang, Enrico Matias et d’autres qui complétaient cet ensemble disparate que nous connaissions par coeur et dont nous nous sommes vite lassés.
Le jour des courses, une fois par semaine, nous partions au marché couvert du Guéliz dans la 203 familiale. Pendant que ma mère faisait les provisions, mon père dans la voiture écoutait des sonates diffusées par l'auto-radio en attendant d’aller chercher les paniers lourdement chargés. Les trois enfants curieux aimions fureter dans les recoins des étalages du marché mais, souvent je préférais rester avec mon père à me remplir des jolies notes de piano et de violon.
Et puis un jour ma soeur adolescente reçut pour son anniversaire un transistor Optalix. Elle le tenait par sa poignée et le promenait partout. Dès son retour de l’école, elle se ruait dessus, on entendait alors le générique SLC Salut les copains ! et l’émission d’Europe n° 1 entra chez nous. Nous connaissions tous les tubes du moment : Cloclo, Marie Laforêt, Hugues Aufray (je disais Hugo Frais) Franck Alamo et bien d’autres.
Nous n’avions pas la télévision, alors la radio était notre ouverture au monde sur fond de palmeraie environnante.
Nous écoutions aussi le vendredi soir les Histoires qui font peur et qui peuplaient nos nuits de cauchemars.
Si je devais choisir une chanson qui a été plus marquante que les autres, ça serait Ma vie d’Alain Barrière. On ne sait pas vraiment dire pourquoi une chanson nous touche plus qu’une autre. Je la trouvait différente de ce que nous entendions habituellement et j’étais suffisamment grande pour en être émue. Dans la voiture, alors que nous partions à Bouznika pour les vacances d’été, elle passa sur Radio Maroc et mon père pesta, il disait que l’amour ça fout’l’camp ça n’était pas très correct ni poétique, ce qui me la faisait aimer davantage. Je la chantais en me regardant dans la glace. Les paroles n’étaient pas compliquées à retenir.
Le soir, du dortoir des enfants où nous dormions avec mes cousins, j’entendais en sourdine les bruits étouffés et lointains du transistor de mon grand-père qui l’écoutait jusque très tard dans la nuit dans sa petite chambre qui sentait le cigarillo. Maaaa viiie !!!
Et c’est en fin d’après-midi, sur la plage déserte, quand le soleil devenait rasant, que j’adorais chanter à tue-tête, seule, face au grondement de l’océan qui couvrait ma voix. Les pieds nus plantés dans le sable tiède, du haut de mes dix ans, j’hurlais Maaa viiiie…J'en ai vu des amants… Maaaa viiie…L'amour ça fout le camp… Je sais… Qu’il est long le chemin …
Un jour, mon père acheta un tourne-disque Teppaz dans son élégante mallette en cuir vert foncé. Le peu de disques que nous possédions à l’époque étaient souvent des cadeaux : un disque d’accordéon pour mon père qui en jouait, des chants de Noël, un disque de jazz à Honolulu, Guy Mitchel (que personne ne connaissait), Marisol que j’avais eu pour me consoler d’une prise de sang, Enrico Matias et d’autres qui complétaient cet ensemble disparate que nous connaissions par coeur et dont nous nous sommes vite lassés.
Le jour des courses, une fois par semaine, nous partions au marché couvert du Guéliz dans la 203 familiale. Pendant que ma mère faisait les provisions, mon père dans la voiture écoutait des sonates diffusées par l'auto-radio en attendant d’aller chercher les paniers lourdement chargés. Les trois enfants curieux aimions fureter dans les recoins des étalages du marché mais, souvent je préférais rester avec mon père à me remplir des jolies notes de piano et de violon.
Et puis un jour ma soeur adolescente reçut pour son anniversaire un transistor Optalix. Elle le tenait par sa poignée et le promenait partout. Dès son retour de l’école, elle se ruait dessus, on entendait alors le générique SLC Salut les copains ! et l’émission d’Europe n° 1 entra chez nous. Nous connaissions tous les tubes du moment : Cloclo, Marie Laforêt, Hugues Aufray (je disais Hugo Frais) Franck Alamo et bien d’autres.
Nous n’avions pas la télévision, alors la radio était notre ouverture au monde sur fond de palmeraie environnante.
Nous écoutions aussi le vendredi soir les Histoires qui font peur et qui peuplaient nos nuits de cauchemars.
Si je devais choisir une chanson qui a été plus marquante que les autres, ça serait Ma vie d’Alain Barrière. On ne sait pas vraiment dire pourquoi une chanson nous touche plus qu’une autre. Je la trouvait différente de ce que nous entendions habituellement et j’étais suffisamment grande pour en être émue. Dans la voiture, alors que nous partions à Bouznika pour les vacances d’été, elle passa sur Radio Maroc et mon père pesta, il disait que l’amour ça fout’l’camp ça n’était pas très correct ni poétique, ce qui me la faisait aimer davantage. Je la chantais en me regardant dans la glace. Les paroles n’étaient pas compliquées à retenir.
Le soir, du dortoir des enfants où nous dormions avec mes cousins, j’entendais en sourdine les bruits étouffés et lointains du transistor de mon grand-père qui l’écoutait jusque très tard dans la nuit dans sa petite chambre qui sentait le cigarillo. Maaaa viiie !!!
Et c’est en fin d’après-midi, sur la plage déserte, quand le soleil devenait rasant, que j’adorais chanter à tue-tête, seule, face au grondement de l’océan qui couvrait ma voix. Les pieds nus plantés dans le sable tiède, du haut de mes dix ans, j’hurlais Maaa viiiie…J'en ai vu des amants… Maaaa viiie…L'amour ça fout le camp… Je sais… Qu’il est long le chemin …
Myrte- Humeur : Curieuse
Re: A. Chanson des ondes
Tu nous livres ici de délicieux souvenirs d’enfance!
Dis moi, Myrte, tu te souviens de tous les détails : les marques des appareils, les occasions pour lesquelles tu as reçu les disques...
De plus j’ai l’impression de te voir toi et ta famille dans ces années là !
J’aimais moi aussi beaucoup, Maaa viiie!
Grâce à ta consigne, voici que nous retournons bien loin en arrière et ça fait du bien!
Dis moi, Myrte, tu te souviens de tous les détails : les marques des appareils, les occasions pour lesquelles tu as reçu les disques...
De plus j’ai l’impression de te voir toi et ta famille dans ces années là !
J’aimais moi aussi beaucoup, Maaa viiie!
Grâce à ta consigne, voici que nous retournons bien loin en arrière et ça fait du bien!
Zephyrine- Humeur : Parfois bizarre
Re: A. Chanson des ondes
Quel petit bijou ce texte, plein de couleurs, d’odeurs, et de musique .
Tes descriptions sont tellement imagées qu’on y est , avec toi, la bas.
J’adore ce genre de texte.
Merci pour ce très beau moment de lecture
Tes descriptions sont tellement imagées qu’on y est , avec toi, la bas.
J’adore ce genre de texte.
Merci pour ce très beau moment de lecture
Cassy- Admin
- Humeur : Emotionnellement vivante
Re: A. Chanson des ondes
Quelle évocation merveilleuse de toute une époque qui fut aussi la mienne.
Y compris le transistor Optalix
chez nous c'était ce modèle-là (CLIC)
J'avais oublié « Les enfants du Pirée » ils sont revenus en bande dans ma tête !
Grand merci pour ce billet si bien écrit et vivant.
Y compris le transistor Optalix
chez nous c'était ce modèle-là (CLIC)
J'avais oublié « Les enfants du Pirée » ils sont revenus en bande dans ma tête !
Grand merci pour ce billet si bien écrit et vivant.
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"Écrire, c'est brûler vif, mais aussi renaître de ses cendres. "
Blaise Cendrars
ICI : Le Blog d'AlainX
alainx- Humeur : ça va ! et vous ?
Re: A. Chanson des ondes
Alain c'est à peu près le même modèle de transistor que nous avions
Myrte- Humeur : Curieuse
Re: A. Chanson des ondes
Quel talent Myrte pour nous dépeindre avec sincérité cette tranche de vie et tous ses petits détails qui la rende tellement vivante et attachante ! Coïncidence troublante, la chanson " Ma vie" est liée à jamais pour moi à ma première grande histoire d'amour dont je parlais dans une précédente consigne et donc reste gravée dans
Ma mémoire !
Ma mémoire !
Amanda- Humeur : positivement drôle
RE A : Chanson des ondes
Je me souviens aussi d'un énorme poste , mes parents écoutaient les informations et nous devions nous taire , plus tard nous avons eu un transistor puis un tourne -disques j'ai découvert Françoise Hardy mais ma sœur préférait Adamo , alors nous nous chamaillions .
automne- Humeur : égale
Re: A. Chanson des ondes
"Ma vie"... Du coup, je suis en train de la réécouter sur youtube...
Et je me souviens que mon père aimait aussi ce chanteur et cette chanson...
Jolis souvenirs, Myrte. Merci.
Et je me souviens que mon père aimait aussi ce chanteur et cette chanson...
Jolis souvenirs, Myrte. Merci.
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Ne méprisez la sensibilité de personne. La sensibilité de chacun, c'est son génie.
(Charles Baudelaire)
FrançoiseB- Humeur : Positive
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