a. Les animaux malades de l'humain

— Tu veux que je te dise, Tigrou, je commence en avoir plein la trompe de jouer les porteurs de valises, comme un vulgaire malfrat de la mafia animale.

— Il y a quoi dedans, Pat D'hef ? Demande Tigrou qui se prélasse sur la plus haute valise.

—  Paraît  qu'elles comportent tous les rapports relatifs à ce qu'il faudrait faire pour améliorer la planète qui part en quenouille. Enfin c'est ce que disent les humains. Aujourd'hui j'en porte quatre pour la prochaine COP sur le climat qui portera le numéro 467. Comme j'ai une mémoire d'éléphant, je sais que depuis des années j'ai déjà transporté  696 valises pleines de ce genre de rapports. D'après ce que m'a dit Le Cerf, qui a des antennes partout jusqu'au fond des bois, personne ne sait plus qui a pu lire ces rapports, mais ils sont depuis belle lurette parfaitement classés par année dans des armoires blindées fermées avec des clés électroniques compliquées.

— J'admire ta culture Pat D'hef ! Quelle chance tu as d'avoir la mémoire de ta race. Moi, je ne te cache pas que je désespère, depuis que nous ne sommes plus que deux ou trois milliers sur terre, et à peine deux ou trois centaines de femelles en âge de procréer ! C'est pas la joie ! Certes, je suis un félin, mais j'ai perdu le filon de la procréation. À mon avis c'est parce qu'on m'oblige à manger végan  alors que je suis un carnivore. Je digère mal le quinoa. Et ma libido part en couilles.

— Tu sais, Tigrou, les temps sont quand même bizarres. La dernière fois que j'ai croisé Le Cerf il m'a dit des trucs du même genre. Quand c'est la saison du brame il a beau gueuler, les nanas se font rares ! On est en train de s'éteindre comme les vieilles bougies de Noël. Ça va mal finir. J'ai l'impression que je vais bientôt perdre mes défenses naturelles.

— Faut que je te dise Pat D'hef, l'autre jour, après un incendie dans la savane, j'ai croisé une biche du genre mignonne, 45 kg, 1,60 m, des yeux superbes (de biche, forcément…) j'en aurais bien fait mon ordinaire. Une femelle, quand c'est tendre, c'est particulièrement délicieux. Mais bon, interdit désormais. Mais le truc qui m'a quand même semblé étonnant : elle avait des bois particulièrement développés et il y avait plein d'oiseaux qui volaient autour comme s'ils y habitaient. J'ai trouvé ça quand même assez chelou. T'en penses quoi ?

— J'ai entendu parler de ça sur « Radio Grandes Oreilles » qui émet sur Savane-Inter : c'est une biche transgenre. Paraît que c'est les bipèdes humanoïdes qui ont commencé les premiers. Et des animaux ont suivi, en particulier chez les cervidés. On voit de plus en plus de biches qui prennent l'apparence du cerf. Certains arbres de la forêt les aident à se transformer. Personnellement j'aimerais pas que ma femelle me trompe de cette manière-là.

— Je suis un tigre qui réfléchit avec la même rapidité que quand je cours la gazelle. Mon cerveau va aussi vite que mes pattes me font courir. D'ailleurs j'ai fait des études de philosophie rapide. J'en suis arrivé à la conclusion que pour sauver la planète il va falloir se débarrasser des bipèdes. Ce sont eux qui ont tout salopé. Pas nous, les braves animaux, qui étions là avant eux. Seulement j'ignore si on peut faire quelque chose pour que ça arrive rapido. On peut quand même pas tous les bouffer. On risque de gros ennuis de santé des douleurs à l'estomac ! Vu que le bipède n'est pas sain du tout parce que plein de maladies de toutes sortes. En plus il fume des plantes hallucinogènes !

— T'inquiète pas mon bon vieux Tigrou, tu devrais écouter Savane Inter, ils ont des correspondants particuliers chez les bipèdes. Paraît que la race humaine continue à se faire la guerre un peu partout. Ça s'intensifie de manière exponentielle. Ils sont bien mieux équipés que nous question outillage pour se détruire entre eux. Il suffit de les laisser faire. De plus en plus ils vont s'entre-tuer jusqu'à disparition complète. Et nous on va pouvoir continuer peinards sur cette belle planète qui va revenir « saine comme avant » !

— Tu me fais plaisir Pat D'hef !

Moralité :
La raison des plus forts de la jungle, restera toujours la meilleure !
Les bipèdes qui veulent se faire aussi gros que les éléphants finiront par exploser.

Ton texte est excellent! Nous savons que le pire prédateur de l’espèce humaine est l’homme lui-même et ces animaux sont d’une clairvoyance acérée. Effectivement, nul besoin de chercher une solution pour exterminer cette espèce destructrice, elle le fait elle-même. Le problème, c’est que beaucoup d’animaux partent avec l’eau du bain. Il parait que quand tout aura disparu, il ne restera que les scorpions qui résistent à tout (même aux radiations nucléaires). J’adore la moralité de la fable, la phrase finale donne la mesure de la suffisance sans limite de l’espèce.