A. Filer en douce

Tony est un jeune gendarme de 24 ans. Depuis la fin de sa formation il est affecté dans une ville au bord de la Manche. Son principal travail consiste à scruter la mer depuis une casemate pour empêcher les migrants de partir vers l’Angleterre dans un bateau de fortune. Il connait bien ce type de surveillance. Avant ses études de gendarmes il a passé plusieurs étés comme pompier volontaire à traquer les départs de feux dans le massif des Alpilles. Il aimait ces longues heures d’observation intense et son cœur battait à tout rompre quand il distinguait au loin une fumée suspecte. L’expérience lui avait maintes fois prouvé qu’avant une catastrophe il ne se passait rien et la vie coulait, lente et paisible.

Cela fait un mois qu’il surveille la mer et rien ne se passe. Pas un seul bateau de migrants à interpeller. Il commence à s’ennuyer et alors qu’il soupire une corne de brume mugit au loin. Son cœur ne fait qu’un bond. L’adrénaline le saisit de plein fouet. Enfin quelque chose rompt ces longues journées monotones.

Tony fouille la mer de ses jumelles. D’où provient cette corne de brume ? Celle-ci retentit encore une fois, deux fois. Il finit par distinguer au loin un bateau de la SNSM accompagné d’autres petites embarcations qui elles aussi actionnent leur sirène. La flottille approche. Il s’agit de vieux gréements qui encadrent manifestement un ancien bateau de pêche. Le concert de sirènes et de corne de brume n’en finit pas. Tony dirige ses jumelles vers le port. Une foule s’amasse là et il distingue au milieu un prêtre.  

« Bien sûr, marmonne-t-il, j’avais oublié ! C’est aujourd’hui que le port accueille la vacquelotte « Le St Jacques » classée monument historique depuis 2014 et restaurée récemment. Un prêtre doit la consacrer. Je passerai voir ce fameux bateau à la fin de mon service ». Alors que Tony est accaparé par l’arrivée de la vacquelotte, un petit bateau file au ras des vagues à l’opposé de celle-ci avec à son bord une dizaine de migrants et disparait très vite au large direction l'Angleterre

Tony finit par se détourner du port et reprend son inspection de la mer. Toujours rien à signaler. Il ressent encore de l’excitation à cette agitation. Dire qu’une minute plus tôt il ne se passait rien et la vie coulait, lente et paisible.

Ton texte, très agréable à lire, nous plonge dans le problème des migrant.
Tu racontes bien la détermination des sauveteurs.

Hélas il n’y a guère de solutions à cette migration et on est loin de l’avoir trouvée.