A - Départ

Un homme entra, un doux sourire aux lèvres qu’elle lui rendit.

« Vous voilà enfin. Je vous attendais depuis si longtemps », souffla-t-elle.

« Je sais ma chère, mais il n’était pas encore temps », murmura-t-il en s’asseyant près d’elle.

« Mais ça y est enfin ! Pourquoi tout ce temps, pensiez-vous que je n’avais pas assez souffert ? » son ton laissait transparaître un peu d’amertume. « Je me suis crue abandonnée. À votre dernière visite, vous m’aviez assurée revenir très vite. »

« Je le sais, cependant en dépit de ce que vous m’aviez affirmée, je sais que vous n’étiez pas encore prête. »

Elle réfléchit un instant.

« C’est vrai, il me restait encore des mises au point à faire, des pardons à accorder et à solliciter. C’est maintenant chose faite, n’est-ce pas, puisque vous êtes à nouveau près de moi. »

À nouveau le chaud sourire de l’homme l’enveloppa, réchauffant ce corps qui ne voulait plus se réchauffer.

« Comment allez-vous procéder ? Je vous fais confiance, mais je ne peux m’empêcher d’avoir un peu d’appréhension. »

« Rien de plus normal, l’inconnu est toujours effrayant. N’ayez crainte, je vais vous accompagner. Êtes-vous prête ? »

Elle prit la main qu’il lui tendait et plantant un regard ferme dans le sien.

« Oui, totalement. »

« Bien, pensez maintenant à un lieu où vous vous êtes sentie pleinement vivante. »

Elle ferma les paupières et une image lui revint. C’était un jour de grande marée, en dépit d’un ciel bleu, l’air était vif et les vagues assaillaient le bout de la jetée. Elle s’était sentie comme un oiseau, libre et ivre, prête à s’envoler au milieu des embruns qui caressaient ses joues.

Lorsqu’elle rouvrit les yeux, le paysage rêvé était là. À nouveau, ce sentiment de liberté revint et avec lui toutes les douleurs endurées depuis des mois commencèrent à se dissoudre.

Elle jeta un regard émerveillé à son compagnon, son séjour sur cette terre s’achevait enfin. Il la tenait, enveloppée avec lui, dans une large cape noire, son regard se fit doux et tendre. Il se contenta de poser sa main droite sur son épaule. Une main légère comme un oiseau.