A. Ne sous estimez pas la force de la Nature

Sherkane Mer 25 Déc 2019 - 19:42

Adolescent Jacques ne se voyait pas dépasser la trentaine. Sa mère étant morte à 30 ans d’un cancer généralisé, il était persuadé qu’il mourait avant cet âge. Et puis cette échéance fatidique dépassée, il se mit à s’estimer invincible et au-dessus des lois de la nature.
Il enchaina les défis. Partir seul en plongée spéléo, chasser le crotale, descendre en surf les plus fortes pentes de montagne…. Aucun sport extrême ne l’arrêtait. Il frôla plusieurs fois la mort mais à chaque fois s’en sortit miraculeusement.

Son dernier défi en date fut de se lancer dans le chamanisme. Ce qu’il fit à fond sans forcément se protéger des esprits qu’il pouvait réveiller. Tellement sûr de lui et de son immortalité.
En cette nuit de lune bleue, il décida d’aller en pleine forêt appeler ses animaux totems. Peu importe qu’une tempête appelée Elsa soit annoncée avec des vents de plus de 150km/h. Bien au contraire ! Lune bleue et tempête une bonne conjonction pour appeler les esprits ! Rempli de charisme, séduisant et charmeur, il convainquit son amie Marie d’aller avec lui.

Les voici donc dans la forêt de Saou et plus exactement sur le versant Nord de Roche Colombe. La nuit était douce. Ils s’installèrent au milieu des hêtres et commencèrent le rituel chamanique. C’est alors que le vent se fit de plus en plus fort. Les arbres se balançaient, craquaient, se heurtaient les uns aux autres dans des gémissements quasi humains.
Marie commença à paniquer et supplia Jacques de s’en aller rapidement de la forêt. Jacques riait de sa peur. Avec lui elle n’avait rien à craindre ! Devant sa peur croissante, il se mit à la recherche d’un abri. Au pied des falaises, ils trouvèrent une petite grotte suffisamment vaste pour les accueillir tous les deux.

La tempête se déchainait de plus en plus, déracinant des arbres qui se fracassaient au sol dans des bruits assourdissants. La terre vibrait. Au loin une meute de loups cria. Un arbre tomba sur leur abri dont les branches bloquèrent l’entrée, créant chez Marie une peur profonde. Quant à Jacques il sentit monter en lui une pulsion primitive, incontrôlable. Il entraina Marie dans des rondes sexuelles qui les laissèrent épuisés, exsangues et couverts de sueur.

Le matin venu, la tempête calmée, Jacques se fraya un passage entre les branches qui obstruaient l’entrée de leur abri et sortit de la grotte, s’étira, et regarda la forêt dévastée, les arbres au sol. Il leva les yeux au ciel remerciant son karma de l’avoir une nouvelle fois protégé de la mort et de lui avoir permis de vivre une expérience inoubliable.

Il se retourna vers Marie, restée à l’entrée de la grotte, un grand sourire aux lèvres. Il lui fit le signe du vainqueur. Il entendit son cri d’avertissement mais ne put pas régir à temps. Un arbre en équilibre sur un surplomb rocheux à sa gauche glissa, le faucha au passage, et l’écrasa

Marie resta un moment tétanisée. Dans un état second elle réussit à sortir de la grotte. Il n’y avait plus rien à faire pour Jacques si ce n’était d’appeler les secours pour ramener son corps. Ce qu’elle fit avant de lui voler un dernier baiser dans un geste irréfléchi et instinctif.