A - Pépé Athanase, Mimi et le Sachem

Mimi, une des arrières-petites-filles de Mémé Célestine et Pépé Athanase, qui était en train de jouer avec ses cousins et ses amis, rentre comme une tornade dans la maison. Le jeu va bientôt se terminer et elle tient à être en bonne position pour profiter du goûter préparé par Mémé Célestine.

Toutefois, aujourd'hui, elle arbore une mine chiffonnée que ne manque pas de remarquer son Papichou.

« Que t'arrive-t-il mon poussin ? »

« Mes cousins sont des imbéciles ! »

« Ah ! Pourquoi dis-tu ça ? »

« Ils n'arrêtent pas de dire que les indiens étaient des méchants et que les cow-boys étaient des gentils. »

« Tu jouais à l'indienne n'est-ce pas ? »

« Bien sûr, moi je trouve qu'on les pas bien traités les indiens. »

Mémé Célestine et Pépé Athanase ne peuvent s'empêcher de sourire. Ah, leur petite Mimi, c'est Zorro sans la cape et les moustaches, toujours à vouloir défendre les plus faibles.

Pépé Athanase va fouiller dans une armoire et en sort un album de photos qu'il tend à Mimi avec un clin d'oeil.

Mimi adore quand son Papichou lui fait des clins d'oeil, ça veut dire qu'il y a une belle découverte à la clé. Elle se dépêche d'ouvrir l'album et bientôt elle tombe sur la photo d'un chef indien paré de ses plus belles plumes campé devant un drôle d'engin qu'elle a d'ailleurs déjà vu quelque part, sauf qu'à la place d'un indien il y avait un chien, mais bon, ce n'est sûrement pas pour ça que Pépé Athanase lui a fait découvrir ce monsieur, d'autant qu'à côté il y a une dame qui lui rappelle quelqu'un mais qui ?

« C'est qui ces gens Papichou ? »

« Le grand Sachem c'est Chef de la Montagne et la dame c'est une de mes grands-tantes. »

« Ta grand-tante elle a connu des indiens, mais elle faisait quoi avec eux ? »

« Elle leur faisait chanter leurs chansons traditionnelles. »

« Comme celles qu'on chante à Noël ? »

« Un peu oui, mais elle les faisait chanter pour ne pas qu'on ne les oublie ces chansons. »

« Ca ne peut pas s'oublier les chansons voyons ! »

« Mais si ma poupée, parfois les chansons disparaissent avec les hommes et leur peuple. »

« C'est moche, ça. Elle était maligne ta grand-tante, je suis sûre que c'est pour ça que tu aimes raconter des histoires, hein Papichou ! » rétorque Mimi, fine mouche.

« Oui, ma chérie, sûrement. »

« Et c'était quoi les chansons qu'il chantait le Sachem ? »

« Je ne sais pas ? A ton avis ? »

« Oh, il devait y avoir des berceuses comme celles que chante Mémé Célestine, et puis des chansons d'amour comme celles de mes grandes cousines et peut-être aussi des chansons de guerre, un hymne national que ça s'appelle, comme celui qu'on nous a fait apprendre à l'école pour la fin de l'année. »

« Oui, il devait sûrement y avoir toutes ces chansons, mais ma grand-tante a aussi écrit qu'il y avait des chansons pour soigner. »

« Des chansons pour soigner ça existe ça ? » Mimi ouvre des grands yeux, elle imagine une chanson qui éviterait que sa maman lui fasse avaler un sirop très mauvais quand elle a mal à la gorge ou pour esquiver les piqûres du docteur. Et c'est ce qu'elle dit à son  arrière-grand-père. Il ne peut s'empêcher de rire. Il précise.

« Ces chansons là faisait du bien au corps, mais surtout à l'esprit. »

« C'est quoi l'esprit ? »

« Tu peux aussi appeler ça l'âme, tu connais ce mot non ? »

« Oui bien sûr, l'âme c'est nous mais invisible. Monsieur le Curé a même expliqué qu'un jour notre âme partait de notre corps et qu'elle montait au ciel. Notre institutrice, elle, elle nous a expliqué que quand on rendait l'âme, mais elle a pas précisé à qui, ben on était mort. Vous êtes drôlement bizarre les grands ! Bon mais c'était quoi ces chansons qui faisait du bien à l'esprit et pourquoi il fallait lui faire du bien à l'esprit ? »

« Ma grand-tante écrivait que Chef de la Montagne lui disait très souvent après avoir terminé de chanter -Fais du bien à ton corps pour que ton âme ait envie d'y rester- »

« Oh, alors je vais chanter tous les jours pour que je ne sois pas obligée de rendre mon âme à je sais pas qui. »

Mimi est toute contente et avant de se jeter sur le goûter de Mémé Célestine, dite Mamichou, elle ajoute :

« Des gens comme Chef de la Montagne qui disent de belles choses comme ça et qui chantent, ça peut pas être méchant, je le savais bien ! »

Et pour une fois Mémé Célestine et Pépé Athanase laissent le mot de la fin à cette petite demoiselle déjà pleine de sagesse.