A- Au delà de la nuit

Ce soir le couché de soleil est magnifique, comme souvent ici, dans cette région. L’occasion de me poser sur ce transat qui me fait de l’œil depuis un moment.
Bientôt la pénombre m’enveloppera et plus bas, tout au Nord seul un grand halo lumineux me rappellera que Toulouse n’est qu’à quelques kilomètres d’ici.
Ici c’est la campagne, la nature, le silence. Ici c’est mon présent et aussi mon futur. La douceur de ce début de nuit, la beauté de ce ciel orangé se prête à la méditation. Mais mon cerveau en ébullition me guilde vers une introspection.

Le chemin que je m’étais tracé, à l’aube de ma vie d’adulte, s’est avéré bien plus sinueux que je ne l’imaginais. Je l’ai entamé avec un peu de crainte et beaucoup d’enthousiasme. J’ai glissé dans mon sac à dos mes souvenirs heureux auxquels j’ai ajouté, chemin faisant, d’autres jolis souvenirs sans penser que les blessures, les deuils et les renoncements pèseraient si lourd qu’il deviendrait parfois impossible d’avancer la tête haute avec l’espoir en étendard.
J’ai fait comme beaucoup, j’ai courbé l’échine en attendant des jours meilleurs.

J’ai eu d’immenses joies, si grandes que j’ai pu avancer sans que mes pieds ne touchent le sol, comme beaucoup.
J’ai eu des peines si profondes qu’elles m’ont fait sombrer dans un puits sans fin, désespérant de trouver la force de remonter à la surface, comme beaucoup.
J’ai appris, que le bonheur n’est pas linéaire , qu’il n’est pas un état permanent, et qu’il fallait saisir chaque instant de grâce que la vie nous offre et l’apprécier à sa juste valeur.
J’ai appris que les échecs ne tuaient pas, et qu’il fallait trouver le courage de continuer .
J’ai appris que la nostalgie n’était pas un frein et que plus on sait regarder loin dans le passé , plus on voit loin dans le futur.
J’ai compris que l’hypersensibilité n’était pas une maladie, qu’elle faisait partie intégrante de mon caractère et que je devais la considérer comme une alliée et pas comme une ennemie. J’ai appris qu’elle pouvait être source d’une grande souffrance mais aussi d’une meilleure compréhension du monde qui m’entoure.
J’ai appris à reculer quand je sens que mon cœur va exploser.
J’ai appris à me réfugier dans la solitude quand tout est trop fort, quand je tremble, quand la colère monte, quand mon cerveau s’embrouille de trop d’informations.
S’apaiser, se recentrer, se faire confiance et s’aimer, s’aimer, s’aimer, j’ai encore tant de choses à apprendre.

Au delà de la nuit, quand je serai prête , quand je me serai ressourcée, je reprendrai mon bâton de marche pour continuer le chemin de ma vie et sur la dernière portion que j’emprunterai, il restera toujours une fenêtre où se pencher, des promesses à tenir, un arbre où  prendre appui.