A. Inspiration?

Les deux hommes sont plantés devant une vieille bâtisse délabrée.
Ils contemplent, la mine dubitative, la lourde porte d’entrée.
- Tu es sûr que c’est là ? Demande le plus vieux des deux
- J’ai vérifié deux fois l’adresse. Oui, c’est ici.
- Ici ?!
-Oui, s’énerve le plus jeune. Allez, viens, on entre !
Et il pousse la porte.

Les couloirs sont vides et mornes.
La peinture s’écaille avec une rare constance.
Les néons clignotent en dispensant une lueur jaunâtre qui contribue à renforcer le côté glauque de l’endroit.
Les rares fenêtres n’ont vu ni chiffon ni produit nettoyant depuis un bon moment. Si quelqu’un tentait de regarder à travers il ne verrait  que traînées grisâtres et chiures de mouche et de pigeons.
Et de tout façon, même si les vitres avaient été faites, la vue n’a rien d’enthousiasmant. Qui rêverait d’un panorama sur déchetterie dans une arrière cour grisâtre et malodorante ?
Une odeur de désinfectant et de mauvaise nourriture industrielle flotte encore dans l’air.
Le sol colle aux pieds, si on lui présentait une serpillière il ne serait sans doute pas en mesure de l’identifier comme telle.
Tout laisse à penser que le lieu est abandonné depuis bien longtemps.
Et pourtant…
Et pourtant un œil attentif pourrait discerner d’imperceptibles signes de présence humaine.
Parmi toutes les portes qui s’égrènent le long des couloirs l’une d’entre elles est intacte. Pas de poignée cassée, pas de chambranle défoncé ou abîmé, pas de numéro de porte à moitié effacé ou de guingois, au contraire : la poignée de la porte 333 est propre, brillante même. Une simple poussée suffit à faire s’ouvrir cette porte, sans un bruit. Le curieux qui s’aventurerait à en passer le seuil pénètrerait dans une pièce relativement lumineuse, aux murs fraîchement repeints en blanc cassé, avec deux fenêtres aux vitres éclatantes protégées par des rideaux de tulle léger.
Une table impeccablement rangée prend ses aises sous la plus grande des fenêtres.
Une chaise métallique patiente sous ladite table.
Un lit une place accoudé à un minuscule placard clôt le tableau.

-Mais  qui pourrait bien choisir de venir s’enfermer dans un vieil hôpital psychiatrique désaffecté ?
Aucune perspective, aucune vue inspirante… Vivre ici, ce serait comme prendre un direct pour un suicide express… Alors comment croire que ce soit l’endroit que privilégiait un célèbre auteur quand il voulait écrire ? Sérieusement ce mec pondait au kilomètre des livres feel good. Chaque sortie d’un nouvel opus déclenchait les hurlements de groupies hystériques prêtes à à peu près n’importe quoi pour pouvoir approcher de près le grand écrivain et le toucher du bout des doigts., murmure le plus jeune des deux hommes.
Son compagnon ne répond rien, il s’approche de la table et jette un coup d’oeil par la fenêtre. Du bout des doigts il pianote sur le plateau de la table.
Lassé de ce silence le plus jeune ouvre le minuscule placard situé près du lit. Sur l’étagère une pile de feuilles imprimées l’accueille. L’homme la saisit d’une main tremblante, s’assoit sur le lit et commence à feuilleter la liasse. Au bout d’une heure il est rejoint par le plus âgé qui se met à lire par dessus son épaule. Lentement la nuit est tombée, amenant avec elle une lourde obscurité dans la pièce, mais les deux hommes continuent inlassablement leur lecture.
Arrivés au dernier feuillet le plus vieux tapote l’épaule de son compagnon avec un sourire en coin et lui pointe du doigt la dernière phrase en déclarant : « Tiens, la voilà la réponse à ta question : « Il reste toujours une fenêtre où se pencher, des promesses à tenir, un arbre où prendre appui. »

Je me suis laissée embarquer par ce texte aux allures légèrement fantastiques au début. Bien décrite l'atmosphère glauque du bâtiment. J'ai trouvé cette manière de traiter la consigne originale et la façon d'amener l'excipit bien habile.

Ce texte nous fait découvrir un lieu étrange avec ce petit cocon bien entretenu qui peut servir de refuge à un écrivain célèbre , peut-être un ancien pensionnaire de l'hôpital psychiatrique ?

Quel texte original. Je ne retrouve pas de référence à la photo ( à part à la fin quand la nuit tombe peut être? ) mais au final je retiens un texte intriguant qui me fait me poser plein de questions: qui sont ces 2 personnes, l’un jeune l’autre plus âgé ? Pourquoi sont-ils là , comment savaient-ils que quelqu’un vivait ici et bien sûr et surtout, qui est cet auteur, ou est-il etc….
Ça donne envie de lire une suite

Un texte original et très bien écrit ! Avec des détails très évocateurs.

Je me pose quelques questions.... Qui sont ces personnages? Devons nous imaginer ce qu’il va advenir à la fin ou alors nous écriras tu la suite?

La description des lieux est une chouette réussite. On suit les personnages pas à pas. On devine un lieu désaffecté… et puis on découvre que c'est un ancien hôpital psychiatrique. Ce n'est pas un lieu neutre. Et dans cet environnement quelque peu surréaliste, la découverte d'un manuscrit.
Moi j'aime bien ce genre de texte où on ne sait pas d'où l'on vient et où on ne sait pas on va. À chacun d'imaginer ce qui lui convient.
Je n'insisterai pas sur la qualité de ton écriture et la manière dont tu amènes ton lecteur où tu veux, parce que je vais ménager ton humilité foncière !

Je suis le point d'interrogation derrière ton titre, Madeleine.
Tu as réussi à me surprendre, à me faire lire et relire pour comprendre : qui ? Quoi ? Où ?
Et ne pas trouver la" clé" m'intrigue ( m'énerve ???)
Tu donnes quelques faibles indications qui me laissent sur ma faim.
Ou je vieillis, ou alors je suis devenue hermétique à cette écrit " fantastique"
Une petite suite, peut-être ?

Quelle écriture et tant pis pour ta modestie . Bien sûr, je me pose bien des questions en le lisant et je n'ai pas de réponse, tant pis je les inventé raison. Tu sais poser le décor et faire naître une ambiance et puis quelle imagination et quelle interprétation de la consigne. Je suis fan.

Merci à tous.