a. Demain le monde

C'est lui qui est venu me visiter. Pouvait-il en être autrement. Ce paysage sans cesse en mouvement bien sûr il pourrait sembler désertique et morne, mais ce n'est pas cela qu'il m'évoque.
C'est l'idée d'avancer. Encore et encore.
Alors me reviennent ses paroles : « Avancer ! Avancer ! C'est toujours ce que j'ai fait ». Et sa vie en témoigne.
Alors certes, avancer dans un monde étrange et penser qu'il peut toujours refleurir quoiqu'il en soit, quoi qu'il arrive, quoi qu'on en pense, quoi qu'on dise.

Et puis cet autre qui disait : « En avant ! En avant, tout est toujours en avant ! » Et sa manière de dire, de faire, d'agir, de ne jamais être en repos, suscitait en nous ce même désir, non par mimétisme ou pour être reconnu, mais parce que ce mouvement habitait aussi en nous, comme une poussée irrépressible qui met en en marche, presque sans effort, parce que nous sommes portés. J'écris au « nous », je pourrais aussi le faire au « je », parce que rien ne s'entreprend vraiment en solitaire, mais en participatif et non pas en suivisme.
Ce n'est pas comme dans les défilés ou les manifestations, les leaders en tête, et les autres suivent plus ou moins bêtement, plus ou moins intelligemment, mais en tout cas ils suivent, moutonniers, ou criant avec les loups,… mais après… ? Après chacun rentre chez soi retrouver son train-train quotidien, ses petites affaires, ses préoccupations routinières et bientôt reviendra la désespérance. La désespérance qui s'infiltre et fait irrémédiablement de nous des perdants.

Là ce n'est pas le cas, le mouvement ne cesse jamais. On est au raz du sol où on prend de la hauteur, mais quoi qu'il en soit jamais une seule image fixe. Et puis cette musique comme une portante, et ces quelques notes de piano dans les aigus, qui reviennent, encore et encore, comme une petite danse guillerette qui ne nous quitte pas parce qu'on sait que l'avenir appartient à l'audace sautillante, à cloche-pied comme l'enfant, en courant comme le jeune, et en quelques pas de danse sous l'ondulation des âges.

Peut-être que finalement le monde ancien est en noir et blanc et qu'il nous appartient de le peindre en couleur, chacun avec ses godets et ses pinceaux. C'est ainsi qu'il ne s'écroulera jamais n'en déplaise aux oiseaux de malheur, aux médias et réseaux sociaux. Ils véhiculent, propagent, hurlent des erreurs. Plus imbéciles qu'eux, je ne connais pas.

Reste que, quoi qu'il en soit, au final ce sera comme dans la chanson de Ferrat « La matinée » :

— Le monde sera beau
Je l'affirme, je signe